Oncologie
Tumeurs malignes : le micro-environnement joue un rôle dans la progression
Une nouvelle étude montre comment le microenvironnement entourant les tumeurs permet au cancer d’échapper aux attaques du système immunitaire. Cette découverte pourrait permettre de renforcer l’immunothérapie contre le cancer.
- Design Cells/iStock
Depuis quelques années, l’immunothérapie suscite un grand intérêt de la part de la recherche pour traiter les patients ayant un cancer avancé. Son objecttif : booster la réponse immunitaire contre les cellules tumorales, des cellules qui utilisent plusieurs stratégies de résistance pour neutraliser et paralyser le système immunitaire de l’hôte.
Si de nombreux traitements innovants ont permis d’améliorer la survie de certains patients, le taux de réponse de l’immunothérapie reste souvent limité en raison du microenvironnement tumoral, qui permet aux tumeurs de résister malgré tout aux attaques du système immunitaire.
Rôle décisif du micro-environnement tumoral
Dans un nouvel article publié dans Nature, des chercheurs de l’université de Pittsburgh (États-Unis) ont analysé comment différentes substances chimiques qui entourent les tumeurs peuvent corrompre le système immunitaire et permettre au cancer de progresser. En menant leurs recherches sur des souris, ils ont découvert qu’en perturbant l’effet du microenvironnement de la tumeur sur les cellules immunitaires, il était possible de réduire la taille des tumeurs, de prolonger la survie et d’augmenter la sensibilité à l’immunothérapie.
"La majorité des gens ne répondent pas à l'immunothérapie, explique Greg Delgoffe, auteur principal de l’étude. La raison est que nous ne comprenons pas vraiment comment le système immunitaire est régulé dans ce microenvironnement tumoral altéré."
Comment le cancer tire profit des cellules-T régulatrices
Notre système immunitaire est composé de plusieurs types de cellules, dont les principales sont les lymphocytes T. Parmi elles, se trouvent les lymphocytes-T tueurs, qui luttent contre les envahisseurs : virus, bactéries et cancer. Un autre type, appelé lymphocytes-T régulatreurs, ou "lymphocytes T-reg" en abrégé, s'opposent aux lymphocytes-T tueurs en agissant comme des protecteurs des cellules de l’organisme. Ces lymphocytes T-reg sont importants pour la prévention des maladies auto-immunes, lorsque les cellules-T tueuses trop actives attaquent les tissus sains de l'organisme.
Pour que toutes ces différentes cellules immunitaires puissent faire leur travail, elles doivent produire de l'énergie et donc se "nourrir". L'équipe de recherche a dont étudié comment les différents types de lymphocytes-T ont des appétits différents, et comment les tumeurs - qui ont de grands appétits - rivalisent pour les nutriments avec les cellules immunitaires infiltrées. Ils ont alors constaté que les lymphocytes-T tueurs et les lymphocytes-T régulateurs ont des appétits très différents, et que les cellules cancéreuses exploitent cette différence. "Les cellules cancéreuses ne se contentent pas d'affamer les lymphocytes-T qui les tueraient, elles nourrissent aussi les lymphocytes-T régulatrices qui les protégent", constate le Pr Delgoffe.
Affamer les lymphocytes T régulateurs pour tuer les tumeurs
Plus spécifiquement, les tumeurs se nourrissent de tous les nutriments vitaux à proximité des lymphocytes-T tueurs pour les affaiblir. Elles excrètent également de l'acide lactique, qui nourrit les lymphocytes-T régulateurs. Pour transformer l'acide lactique en énergie, les lymphocytes-T régulateurs utilisent une protéine appelée MCT1.
Les chercheurs ont donc inversé le processus. En utilisant des souris atteintes de mélanome, ils ont inhibé le gène qui code pour la protéine MCT1. Cela a eu pour conséquence de ralentir la croissance de la tumeur et de prolonger la vie des souris. "Nous avons affamé les T-regs, résume le Pr Delgoffe. Lorsque les lymphocytes T-reg ne sont pas soutenues par la tumeur, les lymphocytes-T tueurs peuvent entrer et tuer le cancer."
À l’heure actuelle, un médicament inhibant la MCT1 est testé chez des personnes atteintes d'un lymphome avancé, et il semble être bien toléré.








