Rhumatologie

Ostéoporose : ostéoformateur ou antirésorbeur ? Tout est dans la séquence

Le romosozumab, un traitement anti-ostéoporotique ostéoformateur, augmente nettement la densité osseuse à la hanche et à la colonne vertébrale, mais les gains sont encore plus importants lorsqu'il est suivi d’une séquence de traitement antirésorbeur. Pas l’inverse.

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  • 13 Novembre 2020
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    Les patients souffrant d’ostéoporose fracturaire obtiendraient des résultats densitométriques sensiblement différents en fonction de l’ordre d’administration des antiostéoporotiques ostéoformateurs et antirésorbeurs.

    Une analyse combinées de différentes études randiomisée, présentée à l'ACR Convergence, le congrès annuel de l’American College of Rheumatology, révèle que le romosozumab, un traitement antiostéoporotique de type ostéoformateur, produit des gains substantiels de densité minérale osseuse (DMO) à la hanche et à la colonne lombaire en un an, et que la prescription secondaire chez ces patients d’un médicament antirésorbeur peut entraîner des gains de DMO encore plus importants (Abstract n°1973).

    Amélioration à la hanche

    Dans les deux études où le romosozumab a été administré pendant 1 an, sans notion de prise préalable d’un antirésorbeur, la DMO totale de la hanche augmente de 6% dans une étude et de 6,2 % dans l'autre. En revanche, lorsque le romozumab est administré après l'alendronate, la DMO totale de la hanche n'augmente que de 2,9% sous romosozumab et lorsqu’il est administré après le denosumab, la DMO totale de la hanche n'augmente que de 0,9% sous romosozumab.

    Sur deux ans (romozumab + antirésorbeur chacun 1 an), lorsque le romosozumab est administré avant l'alendronate, le gain total de la DMO de la hanche sur deux ans est de 7,1% et lorsque le romosozumab est administré avant le dénosumab, le gain de la DMO à la hanche totale est de 8,5%. En revanche, dans l'ordre inverse, lorsque le dénosumab administré en premier pendant 1 an, suivi d’une autre année de romosozumab, le gain total de la DMO de la hanche sur deux ans est inférieur à 3,8 %, soit la moitié seulement.

    Résultats proches au rachis

    Sur un an, lorsque le romosozumab est administré sans notion de prise préalable d’un anti-résorbeur, la DMO de la colonne vertébrale des patients augmente de 13,7% dans une étude et de 13,1% dans l'autre. En revanche, lorsque le romosozumab est administré après l'alendronate, le gain de DMO à la colonne lombaire est de 9,8 %, et lorsqu'il est administré après le dénosumab, le gain de DMO au rachis n’est que de 5,3 %. 

    Sur deux ans, lorsque le romosozumab est administré avant l'alendronate, le gain de DMO de la colonne vertébrale est de 15,2 %, et lorsque le romosozumab a été administré avant le dénosumab, le gain de DMO de la colonne vertébrale est de 16,6 %. Lorsque le romosozumab est administré seul sur 2 ans, le gain de DMO est plus faible, à 11,5 %.

    Séquences thérapeutiques

    Cette analyse a été conçue pour déterminer si, malgré le mécanisme d'action différent du romosozumab versus teriparatide, l'effet sur la DMO serait différent lorsque le romosozumab est administré en deuxième dans la séquence thérapeutique, après un médicament antirésorbeur, par rapport à l'utilisation du romosozumab en premier.

    L'ostéoporose résulte d'une perte de masse osseuse, mesurée par la densité minérale osseuse (DMO), et d'une modification de la structure osseuse. Des études antérieures ont montré qu'un médicament hyperremodeleur, le tériparatide, qui stimule à la fois la formation et la dégradation des os, augmente la DMO à la colonne vertébrale et à la hanche lorsqu'il est utilisé en premier. A l’inverse, lorsque des médicaments antirésorbeurs sont administrés avant, l'effet du tériparatide est différent et la DMO d'un patient peut même diminuer aux hanches.

    Une comparaison des séquences

    Les chercheurs ont évalué le pourcentage d’évolution de la DMO au niveau de la hanche et de la colonne lombaire par rapport à l’inclusion à partir de quatre essais où les patients ont reçu le romozumab avant un traitement antirésorbeur (ARCH Phase 3 [Saag NEJM, 2017] et FRAME Phase 3 [Cosman, NEJM 2016]) ou après un traitement antirésorbeur (STRUCTURE Phase 3 [Langdahl, Lancet 2017] et Phase 2 [Kendler, OI 2019]).

    La variation en pourcentage par rapport à la DMO à l’inclusion a été évaluée soit par un modèle ANCOVA (FRAME) ou à mesures répétées (ARCH, STRUCTURE) en ajustant les covariables de référence, soit sous forme de statistiques sommaires.

    Intérêt des séquences thérapeutiques

    Le romosozumab, un anticorps anti-sclérostine, exerce un mécanisme d'action ostéoformateur sur le tissu osseux lorsqu'il est administré comme traitement pendant un an Dans le cas d’une séquence thérapeutique sur 2 ans où un an de romosumab est suivi d'un an de traitement avec un antirésorbeur (alendronate ou densosumab), l’effet sur la DMO augmente considérablement et s’accompagne d’une réduction significative du risque de fracture par rapport au placebo et à l'alendronate seul sur 2 ans.

    Les femmes qui ont eu des fractures de fragilité récentes ou multiples après la ménopause courent un risque très élevé d'en avoir d’autres (« cascade fracturaire ») et ont besoin de traitement anti-ostéoporotique à même de réduire ce risque de 2ème fracture mais aussi de remonter la densité minérale osseuse de façon qualitative et pérenne afin de ne pas rechuter à l’arrêt du traitement anti-ostéoporotique, celui-ci n’étant jamais un traitement prolongé.

    Rediscuter les recommandations à la hanche

    L'approche standard recommandée par la plupart des autorités de santé consiste à commencer le traitement par des médicaments antirésorbeur. Cependant, les agents de ostéoformateurs, comme le romosozumab, l'abaloparatide et le tériparatide, réduisent le risque de fracture plus rapidement que les médicaments antirésorbeur et il s’avère que leur efficacité sur la DMO est encore renforcée à la hanche par la prescription d’un antirésorbeur en relais (antirésorbeur 2ème).

    Si cet effet sur la DMO à la hanche se traduit également par une réduction du risque fracturaire sur le long terme, rendant inutile la prescription itérative de séquences d’antirésorbeurs sur quelques années, la prescription en premier d’un ostéoformateur deviendra nécessaire chez les femmes qui ont la DMO la plus basse, et en particulier à la hanche.

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