Cardiologie

Fibrillation atriale : une formation en ligne améliore de plus de 50 % l'utilisation des recommandations

Réalisée dans six pays européens, une formation en ligne courte mais ciblée a relevé de 51 % l’adhésion aux recommandations ESC sur le contrôle du rythme dans la fibrillation atriale (FA). Aucun gain, en revanche, n’a été obtenu sur la prévention du risque thromboembolique, celle-ci étant déjà quasi optimale.

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  • 16 Jun 2025
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    La fibrillation atriale, appelée à doubler d’incidence d’ici 2050, dispose de recommandations ESC 2024 précises, mais celles-ci peinent à franchir la porte du cabinet en ville. Le cluster essai randomisé STEEER-AF, premier essai sponsorisé par la Société européenne de cardiologie, a inclus 1 732 patients consécutifs vus dans 70 centres de routine (France, Allemagne, Espagne, Italie, Pologne, Royaume-Uni). Après une photographie initiale, les centres ont été randomisés selon leur performance : le bras intervention a suivi un programme structuré de 16 semaines (≈9 h d’engagement en ligne, quizz, classes virtuelles), l’autre poursuivant la pratique habituelle.

    Selon les résultats publiés dans Nature Medicine, à 6-9 mois, le co-critère primaire « contrôle du rythme » est passé de 21,4 % à 33,9 % (intervention) contre 20,4 % à 22,9 % (contrôle), soit un ratio de risque ajusté de 1,51 ; IC à 95 % 1,04-2,18 ; p = 0,03. Le co-critère primaire « prévention de l’AVC » n’a pas bougé de façon significative (67,5 % vs 60,9 %; RR 1,10 ; IC à 95 % 0,97-1,24 ; p = 0,13), l’utilisation d’anticoagulants étant déjà à un niveau plateau (>60 %).

    Correction du déficit initial sur le choix et le suivi des stratégies de contrôle du rythme

    Au-delà des co-critères primaires, l’indice patient-reporté « Integrated AF-CARE » s’est amélioré de 5,1 % (IC95 % 1,4-8,9 ; p = 0,01) dans le bras formé, traduisant une meilleure coordination interdisciplinaire et une implication accrue du patient. Les analyses de sous-groupes retrouvent un effet homogène quel que soit le type de centre (hôpital universitaire ou périphérique) et le mode de suivi (présentiel ou télé-suivi). Aucune différence n’a été observée sur les événements indésirables cliniques à ce stade, confirmant la sécurité d’une stratégie axée sur l’éducation plutôt que sur des interventions thérapeutiques directes.

    Fait marquant : le principal déficit initial concernait le choix et le suivi des stratégies de contrôle du rythme (décision d’ablation, initiation d’antiarythmique de classe Ic/III ou contrôle strict de la fréquence), signe d’un besoin pédagogique ciblé plus que d’un manque de ressources techniques.

    Premier essai sponsorisé par la Société européenne de cardiologie

    Ces résultats proviennent d’un essai méthodologique robuste : randomisation par grappes équilibrée sur l’adhésion de départ, collecte prospective, et analyse en intention de former. La représentativité est forte : soins courants, six systèmes de santé, centres secondaires inclus. Néanmoins, la durée de suivi courte et l’absence de mesure d’impact clinique (AVC, hospitalisations) limitent la portée externe.

    Selon l’ESC et les auteurs, l’étude suggère d’intégrer, dans chaque service, des modules numériques courts, validés, concentrés sur les poches d’implémentation déficientes plutôt que de répéter des messages déjà acquis. Les cliniciens devraient, dès maintenant, auditer leur propre taux de prescriptions et de décisions rythmiques, puis programmer un e-learning ciblé. Pour la recherche, deux axes se dégagent : combiner éducation des soignants et empowerment des patients pour tester un « AF-CARE complet », et prolonger l’observation afin de relier le gain d’adhésion rythmique aux issues dures, notamment qualité de vie, hospitalisations et démence vasculaire.

     

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