Cardiologie
Hypercholestérolémie familiale : un inhibiteur oral de PCSK9 fait aussi bien que l’injectable
Chez des adultes avec hypercholestérolémie familiale pas encore aux objectif malgré une association statine-ézétimibe, un anti-PCSK9 oral réduit le LDL-Cholestérol d’environ 60 % à 24 semaines et maintient cet effet à 52 semaines, avec une tolérance comparable au placebo.
- Naeblys/istock
L’hypercholestérolémie familiale hétérozygote (HeFH) concerne près d’un cas sur 250 personnes et expose à une athérosclérose précoce par une exposition cumulée des organes cibles au LDL-C dès la naissance. Malgré une escalade thérapeutique, nombre de patients HeFH n’atteignent pas les objectifs recommandés, et les anti-PCSK9 injectables, bien qu’efficaces, restent sous-utilisés.
L’enlicitide décanoate, macro-peptide oral inhibant PCSK9, a été évalué dans l’essai de phase 3 CORALreef HeFH. Trois cent trois adultes (âge moyen 52,4 ans, 51 % de femmes), tous sous statine (81,5 % à forte intensité ; 64,4 % sous ézétimibe), avec un LDL-C moyen de 119 mg/dL, ont été randomisés entre enlicitide 20 mg/j ou placebo pendant 52 semaines.
Selon les résultats publiés dans le JAMA, le critère primaire, la variation moyenne de LDL-C à 24 semaines, montre un abaissement de −58,2 % sous enlicitide contre +2,6 % sous placebo, soit une différence de −59,4 % (IC à 95 % −65,6 à −53,2 ; p<0,001). À 52 semaines, la baisse reste profonde (−55,3 % vs +8,7 % ; différence −61,5 % ; p<0,001). En première intention, l’étude confirme donc une efficacité lipidique majeure, soutenue un an.
Un profil métabolique cohérent
Au-delà du LDL-Cholestérol, le profil athérogène s’améliore de façon concordante. À 24 semaines, le non-HDL-C diminue en moyenne de −52,3 % sous enlicitide contre +2,1 % sous placebo, l’apolipoprotéine B de −48,2 % contre +1,8 % (différence −49,1 % ; p<0,001), et la lipoprotéine(a) médiane chute de −24,7 % contre −1,6 % (différence −27,5 % ; p<0,001). Les effets apparaissent rapidement, avant 4 semaines, et se maintiennent jusqu’à 52 semaines, sans hétérogénéité notable entre sous-groupes descriptifs.
La tolérance est rassurante sur un an : incidences d’événements indésirables, d’événements graves et d’arrêts pour effets indésirables similaires entre les groupes enlicitide et placebo, y compris dans un contexte de polythérapie hypolipémiante. Ces éléments militent pour un bénéfice incrémental substantiel chez des HeFH sous traitement hypolipémiant déjà optimisés, en ligne avec l’objectif de réduction relative ≥50 % et de seuils <70 mg/dL chez les sujets à haut risque, objectifs que beaucoup n’atteignent pas avec les seules options orales actuelles.
De la baisse lipidique au bénéfice clinique
CORALreef HeFH est un essai international, randomisé, en double bras parallèles, conduit sur 59 centres dans 17 pays, avec répartition 2:1, traitement quotidien pendant 52 semaines et évaluation des critères en aveugle. La population inclut des HeFH documentés (génétique ou algorithme local), exigeait une statine au moins modérée, et des seuils d’inclusion de LDL-C adaptés à la présence d’ASCVD (≥55 mg/dL avec antécédent majeur ; ≥70 mg/dL sinon), ce qui reflète une pratique de « traitement de fond optimisé » mais peut sous-représenter des profils d’adhésion fragile ou d’intolérance vraie aux statines. La généralisabilité est donc forte pour les HeFH suivis en cardiologie/lipidologie disposant d’un traitement optimisé par statine, y compris à forte dose, et ézétimibe ; elle l’est moins pour les patients non observants, intolérants aux statines ou en soins primaires sans parcours spécialisé.
Selon un éditorial associé, ces données permettent d’envisager, chez les adultes HeFH qui ne sont pas aux objectifs malgré une association statine et ézétimibe, l’association avec un anti-PCSK9 par voie orale lorsque les obstacles d’accès, d’acceptabilité ou d’adhésion limitent l’usage des formes injectables. Les changements de pratique restent toutefois conditionnés à la démonstration d’un bénéfice sur les critères cliniques durs : un essai sur les critères d’évènements cardiovasculaire (CORALreef Outcomes) est en cours et devra établir la traduction de la baisse massive du LDL-C en réduction d’événements. D’ici là, l’option orale ouvre une perspective pragmatique pour intensifier l’association hypolipémiante chez des HeFH à haut risque, potentiellement en améliorant l’adhésion à long terme et l’équité d’accès aux thérapies puissantes.











