Pédiatrie

Cannabis en prénatal : risques obstétricaux et néonataux confirmés

Le cannabis pendant la grossesse augmente significativement les risques de faible poids de naissance, de prématurité et de petit poids pour l’âge gestationnel, indépendamment du tabac. Ces données renforcent l’importance du conseil aux femmes enceintes et orientent les futures politiques de santé publique.

  • Yana Tatevosian/istock
  • 06 Mai 2025
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    Au cours des vingt dernières années, l’usage de cannabis pendant la grossesse a plus que doublé, devenant la substance illicite la plus utilisée en péripartum. Le Δ9-THC traverse la barrière placentaire et se lie aux récepteurs endocannabinoïdes foetaux, suscitant des inquiétudes quant à ses effets sur le développement. Les études antérieures, souvent limitées par l’auto-déclaration et la polysubstance, suggèrent un lien entre usage prénatal de cannabis et complications obstétricales (mortinaissance, retard de croissance).

    La présente mise à jour d’une revue systématique avec méta-analyse vise à évaluer, en ajustant sur le tabac et autres facteurs confondants, l’association entre consommation de cannabis en grossesse et quatre critères principaux : naissance prématurée (< 37 SA), petit pour l’âge gestationnel (SGA), faible poids de naissance (< 2 500 g) et mortalité périnatale.

    Selon les résultats, publiés dans JAMA Pediatrics, sur 51 études (N = 21 146 938), dont 8 nouvelles (1 709 998 participantes), un niveau de preuve modéré indique une augmentation des odds ratios (OR ajustés) pour le faible poids de naissance (20 études ; OR, 1,75 [IC à 95 % 1,41-2,18]), la prématurité (20 études ; OR, 1,52 [IC à 95 % 1,26-1,83]) et le SGA (12 études ; OR, 1,57 [IC à 95 % 1,36-1,81]). La mortalité périnatale, rapportée dans 6 études, présente un risque accru de 29 % (OR, 1,29 [IC à 95 % 1,07-1,55]) avec un degré de confiance faible.

    Un gradient de risque proportionnel à l’intensité de consommation

    L’analyse dose-réponse confirme un gradient de risque proportionnel à l’intensité de consommation. Les études secondaires, incluant sous-groupes selon trimestres d’exposition, fréquence d’usage et co-usage de tabac, corroborent ces associations, même après ajustement. Les analyses de sensibilité excluant les fumeuses exclusives de tabac n’ont pas modifié les conclusions, attestant de l’effet indépendant du cannabis. Les méta-analyses non ajustées et ajustées montrent une cohérence inter-études et une hétérogénéité modérée (I² < 50 %).

    Les effets indésirables maternels graves sont rares et principalement liés aux complications obstétricales mentionnées ; aucun effet de tolérance ou de sevrage n’est décrit, mais l’absence de données sur la durée d’usage et la puissance des produits reste une limite.

    Une méta-analyse sur une revue de la littérature de 2021 à 2024

    Cette revue vivante couvre la littérature de novembre 2021 à avril 2024 (MEDLINE, CINAHL, PsycInfo, Global Health, Cochrane), sélectionnant cohortes et cas-témoins ajustés pour au moins le tabac. Le risque de biais a été évalué via l’échelle de Newcastle-Ottawa, et la synthèse qualitative selon GRADE. La large inclusion (> 21 millions de grossesses) et la diversité géographique rendent les résultats généralisables aux pays occidentaux à prévalence croissante de cannabis. Toutefois, l’hétérogénéité des modes et intensités de consommation, l’absence de données sur le THC plasmatique et le contrôle incomplet de la cinétique pharmacologique limitent la précision des recommandations.

    Selon les auteurs, ces résultats appellent à systématiser le dépistage et le conseil sur le cannabis lors des consultations prénatales, à intégrer des messages de prévention ciblés et à renforcer les stratégies de réduction des méfaits. Sur le plan de la recherche, des études prospectives mesurant objectivement l’exposition (dosages biologiques, analyse des produits consommés) sont nécessaires pour affiner le lien dose-effet et déterminer les fenêtres de vulnérabilité fœtale. Enfin, l’évaluation de programmes de sevrage prénatal et l’impact économique de la réduction de l’usage sur la morbi-mortalité périnatale constituent des pistes majeures pour les politiques de santé publique.

     

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