Oncologie

Immunothérapie : renforcer son efficacité en déstressant les lymphocytes T intra-tumoraux

Cibler des protéines-clés, qui contrôlent la réponse au stress des lymphocytes T quand ils sont à l’intérieur des tumeurs solides, pourrait aider à mettre au point des immunothérapies plus puissantes contre le cancer.

  • arcin Klapczynski/istock
  • 21 Déc 2022
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    Le grand espoir de l'immunothérapie dans le cancer est de renforcer nos propres cellules immunitaires de manière spécifique pour empêcher les cellules cancéreuses de leur échapper. Selon le Pr Jessica Thaxton, du groupe d'immunothérapie du Lineberger Comprehensive Cancer Center de l'UNC, l'une des raisons des problèmes actuels est le stress que subissent les lymphocytes T lorsqu'ils s'infiltrent dans les cancers solides.

    Une synthèse normale des protéines par les lymphocytes T est indispensable à des réponses immunitaires robustes or la concurrence entre les cellules vis-à-vis des nutriments dans la tumeur solide et les facteurs de stress globaux dans le microenvironnement tumoral (TME) peuvent avoir un impact sur la traduction des protéines dans les lymphocytes T et l'immunité antitumorale.

    Impacft délétère de la réponse au stress

    Les derniers travaux de ce groupe de recherche, publiés dans la revue Cancer Research, montrent en détail comment la réponse au stress des lymphocytes T à l’intérieur des tumeurs solides peut conduire à leur incapacité à freiner la croissance tumorale. Les chercheurs de l’UNC ont découvert que les lymphocytes T exposés au micro-environnement des cancers solides subissent une réponse naturelle au stress qui interrompt leurs fonctions, limitant ainsi la capacité des lymphocytes T à tuer les tumeurs. En manipulant plusieurs protéines dans la voie de réponse au stress à l'intérieur des lymphocytes T, l'équipe de Thaxton a montré qu'il était possible de surmonter la réponse intrinsèque au stress des lymphocytes T pour permettre au système immunitaire de contrecarrer la croissance du cancer.

    La protéine de stress PKR ER-like kinase (PERK)

    Au centre de cette recherche se trouve une protéine appelée PKR ER-like kinase (PERK), qui est un important capteur de stress pour tous les types de cellules, y compris les lymphocytes T, mais qui n'a pas été étudiée en détail dans le contexte de l'immunité. En d'autres termes, lorsqu'un lymphocyte T est soumis à des contraintes, comme lorsqu'il est confronté à l'environnement hostile créé par les cellules cancéreuses, c'est PERK qui répond au stress afin d’amener les lymphocytes T à cesser de sécréter des protéines dans le but de les aider à survivre.

    Or, pour que l'immunothérapie soit efficace, les lymphocytes T doivent sécréter des éléments tels que des cytokines cytotoxiques afin de tuer les cellules tumorales. Les lymphocytes T font partie des cellules les plus sécrétoires de l'organisme, produisant en état d'activation environ 800 000 protéines par minute contre les envahisseurs étrangers. L'arrêt de la traduction des protéines est une mesure de protection dans la plupart des cellules et fait partie du volet aigu de la réponse au stress des lymphocytes T. Tout indique dans la littérature scientifique que le volet aigu de la réponse au stress médiée par PERK vise à protéger les cellules dans des environnements hostiles.

    Le rôle clé de PERK dans l’immunothérapie des tumeurs solides

    Cela a conduit ce groupe de recherche à mener des expériences pour déterminer si PERK lui-même était responsable du mauvais contrôle des tumeurs par les lymphocytes T ou si d'autres acteurs de la voie de signalisation initiée par le PERK pouvaient être responsables de l'inhibition de la sécrétion de protéines dans les cellules T, car les protéines à l'intérieur des cellules fonctionnent à travers une cascade complexe d'interactions.

    En 2019, le laboratoire de Thaxton a créé des lymphocytes T dépourvus de PERK et a transfusé ces lymphocytes à des hôtes porteurs de tumeurs. Dans cette expérience, les lymphocytes T, incapables de subir la réponse au stress par le biais de PERK, parvenaient très bien à contrôler la croissance tumorale. À l'aide de modèles animaux, le groupe a également montré que l'efficacité des immunothérapies utilisées en clinique pouvait être augmentée par l'ajout d’inhibiteurs de PERK, ce qui démontre encore une fois que PERK nuit à une immunothérapie efficace des tumeurs solides.

    p-eIF2 alpha : une nouvelle cible en cas d’immunothérapie

    Le laboratoire de Thaxton a découvert que lorsque PERK est activé, la modification d'une molécule appelée p-eIF2 alpha est responsable de l'arrêt momentané de la synthèse protéique par le lymphocyte T pendant la réponse au stress. Lorsque le laboratoire de Thaxton a forcé p-eIF2 alpha à cesser sa fonction naturelle, les lymphocytes T ont poursuivi la synthèse des protéines et ils ont pu continuer à contrôler la croissance tumorale chez les souris.

    Les recherches de cette équipe montrent qu'il est tout à fait possible de modifier les lymphocytes T, génétiquement ou pharmacologiquement, pour améliorer leur capacité à combattre les cellules tumorales cancéreuses.

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    JDF