Diabétologie
Hypoglycémies sévères : plus fréquentes dans les diabètes avec co-morbidités
La fréquence des hypoglycémies sévères serait très supérieure chez les diabétiques en consultation de ville ou d'hôpital, en particulier en cas de co-morbidités et avec certains traitements, jusque-là non-pris en compte.
- Jeremy Maude / Mood Boa/REX/SIPA
Dans une étude parue online dans Diabetes Care, les taux d’hypoglycémies sévères (requérant une intervention médicale) sont de 1.4 à 1.6 pour 100 patients-années dans la vraie vie, à comparer à 0.3 à 1.0 dans les études randomisées (ACCORD, ADVANCE, ORIGIN).
Ces résultats sont issus d’une étude de cohorte entre 2005 et 2010 à partir des données électroniques d’une compagnie d’assurance sur plus de 900 000 diabétiques, en majorité de type 2 (SUPREME-DM).
Importance des co-morbidités
L’incidence des hypoglycémies sévères est particulièrement élevée chez les diabétiques âgés et ceux qui ont une insuffisance rénale, une insuffisance cardiaque congestive, une maladie cardiovasculaire, une dépression et un taux d’HbA1c élevé. Les hypoglycémies sévères sont également plus fréquentes chez les diabétiques traités par insuline, insulinosécréteur ou bêta-bloquant.
L’étude ne permet pas d’analyser les données en fonction du type de diabète, mais les diabétiques de type 2 représentent près de 95% des malades de la cohorte.
La prévalence des comorbidités va de 4,9% pour l’insuffisance congestive à 18,7% pour les maladies cardiovasculaires. Les diabétiques qui ont une insuffisance rénale, une insuffisance cardiaque congestive, une maladie cardiovasculaire, ont ainsi un risque d’hypoglycémie 4 à 8 fois plus élevé que les autres. De plus, ceux qui ont une dépression associée voient leur risque augmenter de 50%. Par ailleurs, les diabétiques qui avaient eu au moins 2 épisodes d’hypoglycémie sévère tendent à avoir plus de co-morbidités que les autres.
Influence de l’âge, de l’HbA1c et des bêta-bloquants
L’hypoglycémie sévère a peu évolué au fil des ans, passant de 1.59 pour 100 patients-années en 2006 à 1.37 pour 100 patients-années en 2010 sans réelle différence entre les sexes. Par contre les hypoglycémies sévères sont plus fréquentes chez les diabétiques de 20 à 44 ans (où il y a plus de diabétiques de type 1) et chez les diabétiques de plus de 75 ans.
Les diabétiques avec une HbA1c haute ont aussi le taux le plus élevé d’hypoglycémies sévères : 2.44 à 2.77 pour 100 patients années avec une HbA1c au-dessus de 9% versus 0.86 à 1.20 pour 100 patients-années chez les diabétiques avec une HbA1c en-dessous de 7%.
Enfin, les diabétiques qui prennent un bêta-bloquant ont un taux d’hypoglycémies sévères plus important (1.69 à 3.29 pour 100 patients-années) que ceux qui n’en prennent pas (1.23 à 1.45 pour 100 patients-années ; p<0.001). Les bêta-bloquants peuvent masquer les symptômes d’hypoglycémie, mais une précédente analyse n’avait pas observé de différences entre les bêta-bloquants cardio-sélectifs et les autres. Dans cette étude, aucune analyse différenciée n’a pu être effectuée en fonction du type de bêta-bloquant et des co-morbidités
Les diabétiques qui sont recrutés dans les essais randomisés sont en meilleure santé et donc moins compliqués à gérer que les malades rencontrés en consultation.
Au-delà, cette étude démontre une fois de plus qu’il convient d’adapter les objectifs thérapeutiques et le traitement du diabète en fonction du terrain : l’âge bien sûr, mais aussi les co-morbidités et, ce qui est plus nouveau dans cette étude, les bêta-bloquants.
Les risques que font courir les bêta-bloquants dans cette population pourraient même dépasser leurs bénéfices.








