Pédiatrie

Appendicite non compliquée de l’enfant : l’antibiothérapie est une alternative à discuter

Chez l’enfant et l’adolescent, la prise en charge non opératoire par antibiotiques (NOM) d’une appendicite aiguë non compliquée évite souvent l’appendicectomie initiale mais s’accompagne, à un an, d’un taux d’échec et de complications majeures non négligeable par rapport à la chirurgie.

  • Nadzeya Haroshka/istock
  • 07 Octobre 2025
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    L’appendicite aiguë est l’une des urgences abdominales pédiatriques les plus fréquentes. Si l’appendicectomie laparoscopique est le traitement standard pour les formes non compliquées, l’amélioration des diagnostics et des protocoles de traitement relance l’intérêt d’une stratégie conservatrice par antibiothérapie seule, supposée réduire les complications opératoires immédiates et accélérer la reprise d’une vie normale. Une méta-analyse actualisée, limitée aux essais cliniques randomisés (7 ECR, 1480 enfants et adolescents), compare de façon robuste NOM et chirurgie à un an.

    Selon les résultats publiés dans JAMA Pediatrics, le signal est net : le taux d’échec (définis selon les essais, incluant récidive/appendicectomie secondaire) est significativement plus élevé sous NOM (RR 4,97 ; IC à 95 % 3,57–6,91 ; I²=0 %) mais le succès à un an est plus faible (RR 0,67 ; 0,60–0,75 ; I²=31,1 %). Surtout, les complications majeures (Clavien-Dindo ≥IIIb) sont plus fréquentes avec le traitement antibiotique (RR 33,37 ; 7,89–141,05 ; I²=9,5 %). Une analyse séquentielle d’essais confirme la robustesse et le caractère conclusif de ces critères principaux.

    Au-delà de l’échec : récidives, retours et tolérance

    Le prix du traitement conservateur par antibiotique est la récidive : le taux agrégé sous NOM atteint 18,47 événements/100 observations (IC à 95 % 12,62–25,07 ; I²=48,5 %). En miroir, la stratégie antibiotique offre un gain discret en réhabilitation : retour à l’école plus rapide (différence moyenne −1,36 jour ; IC à 95 % −2,64 à −0,08 ; p=0,04 ; I²=57,7 %) et retour aux activités plus précoce (−4,93 jours ; −8,68 à −1,19 ; p=0,01 ; I²=87,2 %). Ce bénéfice initial peut toutefois être contrebalancé par des réadmissions et des réinterventions en cas de récidive.

    Côté sécurité, le profil global d’événements indésirables reste bas dans les deux bras, mais le surcroît de complications majeures sous NOM doit être explicité aux familles. Enfin, l’antibiothérapie expose à un enjeu « d’antibiostewardship » souvent peu rapporté : recours fréquent à des schémas à spectre larges et parfois prolongés, avec un impact collectif sur l’antibiorésistance à considérer dans la décision.

    Deux stratégies, des compromis clairs

    Cette synthèse a inclus exclusivement des essais contrôlés randomisés pédiatriques comparant la NOM à la chirurgie, identifiés sur cinq bases, avec des modèles à effets aléatoires, une évaluation indépendante du biais, et une analyse séquentielle pour juger de la validité des preuves. Les critères principaux (échec/succès à 1 an, complications majeures) sont cliniquement pertinents mais composites, définis de manière variable d’un essai à l’autre, soit une source d’hétérogénéité interprétative. Le suivi est court à intermédiaire (1 an), alors que des séries suggèrent des échecs cumulés à 30–40 % à 5 ans sous NOM ; la méta-analyse n’apporte donc pas encore de certitude sur le long terme. Malgré ces limites, la cohérence des effets (I² faible sur les critères majeurs) et la qualité méthodologique soutiennent une applicabilité large aux enfants/adolescents présentant une appendicite non compliquée correctement caractérisée.

    Selon un commentaire associé, deux parcours « valides » coexistent, avec des valeurs différentes selon les familles : soit la chirurgie d’emblée avec une forte probabilité de résolution définitive à court terme, une morbidité opératoire faible mais non nulle et une convalescence standardisée ; soit le traitement antibiotique conservateur avec éviction initiale de la chirurgie et reprise plus rapide au prix d’un risque accru de récidive et d’un surcroît de complications majeures à un an, plus une empreinte antibiotique à discuter.

    La décision partagée doit s’appuyer sur des chiffres simples : probabilité d’éviter l’opération initiale mais risque de près de 18 % de récidive à 1 an sous NOM, versus très faible risque de complication majeure après appendicectomie dans les formes non compliquées. Il paraît indispensable en recherche de prolonger le suivi au-delà d’un an, de standardiser les définitions de succès/échec et des complications, de rapporter l’exposition antibiotique et de tester des schémas plus courts/ambulatoires.

    Ces données récentes issues d’essais randomisés invitent à un choix partagé, fondé sur des trajectoires de soins et non sur un vain classement « supérieur/inférieur ».

     

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