Néonatologie

Prématurité : le pronostic s'est amélioré jusqu'à 23 semaines

La proportion d’enfants nés à 23 et 24 semaines de grossesse, sans séquelle neurologique majeure, a augmenté de 25%. Il est donc raisonnable de les prendre en charge, selon le Pr Olivier Claris.

  • plepraisaeng/Epictura
  • 06 Mars 2017
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    Le pronostic des grands prématurés nés entre 22 et 24 semaines de grossesse, a beaucoup évolué en 10 ans. Seulement un sur 3 survivait dans les années 2 000, tandis que les autres présentaient de lourdes séquelles. Une étude parue dans le NEJM, menée entre les années 2000 et 2011, montre qu’un important pourcentage d’entre eux se développe sans séquelles motrices ou cognitives modérées à majeures. Les progrès techniques réalisés dans la prise en charge des grands prématurés, l’utilisation des stéroïdes chez la maman à risque et la nourriture par lait maternel, ont contribué à ces résultats.

    4274 enfants nés entre 22 et 24 semaines de grossesse, dans 11 centres du réseau néo-natal nord-américain ont été suivis. 30% de ces enfants nés au début de l’étude, soit entre 2000 et 2003, ont survécu ; ils étaient 36% entre 2008 et 2011. A noter que les enfants nés entre 23 et 24 semaines avaient les meilleures performances, tandis que la survie globale des enfants nés à la 22e semaine est restée à 4% tout au long de l’étude qui a duré 12 ans.

    Durant ces 12 années, le pourcentage des enfants qui ont présenté des déficits moteurs et cognitifs entre 18 et 22 mois, est resté stable, entre 14 et 16%. Par contre la proportion d’enfants sans séquelle neurologique modérée à sévère a augmenté de 25% : elle est passée de 16 à 20%.

    L’amélioration des taux de survie et du pronostic à long terme tient à de nombreux facteurs. La diminution du nombre d’infections néonatales est liée, entre autres, à l’usage de plus en plus fréquent des stéroïdes en fin de grossesse. En effet, les stéroïdes permettent d’accélérer la maturation des poumons avant la naissance. En début d’étude, 58% des mères en ont bénéficié ; elles sont passées à 64 % à la fin du suivi. Il en est de même pour l’usage de plus en plus fréquent du lait maternel qui participe à la baisse du nombre d’infections.

    Pour le Pr Olivier Claris néonatologue, responsable du service de réanimation néonatale à l’hôpital femme-mère-enfant à Lyon, les résultats à long terme de la grande étude française, EPIPAGE 2 qui suit le devenir des prématurés, sont très spectaculaires.

     Quels sont les résultats à long terme, de l’étude française  EPIPAGE 2 ?

    Pr Olivier  CLARIS : En 2011 sur toute la France,  parmi les enfants nés à 22 semaines, il n’y a eu aucun survivant. La survie à 23 semaines est extrèmement faible, celle à 24 « assez faible ». Mais on constate qu’à ces âges gestationnels, il y a très peu de corticothérapie anténatale. Pour l’instant on a les résultats à 2 ans qui sont bien meilleurs que ceux obtenus en 1997, c’est à dire qu’en 14 ans on a amélioré la survie et diminué les séquelles. Par exemple le taux de paralysie cérébrale qui était chez les moins de 32 semaines de l’ordre de 10% en 97, est tombé à 4%, donc diminution d’un facteur de 2,5, ce qui est « colossal » !

    Ecoutez l'intégralité de l'interview d'Olivier Claris :

     

    Et plus précisemment, quels résultats avez-vous à 24 semaines dans votre expérience ?

    Pr Olivier  CLARIS : A 24 semaines on obtient 45% de taux de survie et aucune séquelle neurologique majeure. On constate des difficultés cognitives, des troubles du comportement, mais pas de cécité et pas de surdité. Donc à 24 semaines on obtient des résultats qui ne sont pas mauvais en terme de qualité de vie et qui finalement ne sont pas pires que ceux retrouvés à 25, 26 ou 27 semaines. Moi j’ai vu des séquelles très graves à 28 ou 32 semaines que je n’ai pas vues à 24 semaines.

     Au total qu’apporte la nouvelle étude américaine publiée dans le NEJM ?

    Pr Olivier  CLARIS : Les auteurs constatent une amélioration de 25% de la survie sans séquelles chez des grands prématurés nés entre la 23 et 24 ème semaine de grossesse. C’est un progrès considérable, mais il ne faut pas oublier que dans cette catégorie d’âge, 80% des enfants survivent certes, mais avec des problèmes importants. Je pense que ce sont des arguments pour dire qu’on continue à progresser et qu’il n’est pas déraisonnable de prendre en charge des enfants aussi petits. Mais, et c’est mon message, il ne faut le faire qu’à condition de respecter certaines règles : la corticothérapie anténatale, le lait maternel chez l’enfant, la lutte efficace contre les infections…bref assurer une qualité de prise en charge aussi bien à la période anténatale qu’à la naissance dans des centres expérimentés.

     

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