Oncologie
Cellules cancéreuses dormantes : liées au risque métastatique, elles sont désormais une cible
La découverte de cellules cancéreuses quiescentes, cachées dans les os, et l’analyse des gènes activés dans ces cellules dormantes, permet de mieux comprendre les interactions avec leur microenvironnement et débouche sur de nouvelles cibles thérapeutiques.
- luchschen/istock
Plus que les cellules à croissance rapide qui se propagent de façon incontrôlable, ce sont surtout les cellules cancéreuses dormantes et inactives qui représentent désormais le plus grand danger dans le cancer. En effet, ces cellules cancéreuses inactives car dormantes, lorsqu'elles sont « réveillées », sont l'une des principales causes de réapparition ou de rechute des cancers après un traitement, souvent sous forme de métastases. Or les métastases seraient responsables de 90 % de tous les décès par cancer.
Dans le myélome multiple, une hémopathie difficile à éradiquer de l’os, et d'autres cancers qui se propagent ou se métastasent aux os, comme le cancer du sein ou de la prostate, des chercheurs ont découvert qu’un ensemble unique de gènes maintiendrait certaines cellules cancéreuses « en sommeil ». Les résultats sont publiés dans la revue Blood.
Une bombe à retardement
Lorsqu’un cancer métastase, il se propage à différents organes du corps humain mais certaines cellules cancéreuses peuvent cesser de se diviser, passer dans un état métabolique « dormant », et se cacher dans des niches comme la paroi interne des os. Une fois ces cellules en état dormant, le système immunitaire n’est plus capable de les trouver pour les cibler. Du fait de cet état métabolique « dormant » (mais pas inactif), la chimiothérapie conventionnelle est également inefficace, sans qu’il soit possible de savoir combien de temps les cellules resteront dormantes.
Pour prévenir la réactivation des cellules cancéreuses dormantes, il faut savoir ce qui les rend dormantes. Mais isoler ces cellules pour les étudier est un défi car elles sont rares (souvent moins d'une cellule sur des centaines de milliers dans l'os), et les scientifiques ne savaient pas très bien comment les identifier.
Une approche différente
A l’inverse d’autres équipes, les chercheurs du Garvan Institute of Medical Research, en Australie, et du Weizmann Institute of Science, en Israël, ont analysé l'écosystème global du cancer. Ce n'est pas seulement la cellule cancéreuse active qui a été analysée mais les cellules dans leur microenvironnement qui déterminent leur destin.
A l’aide d’une nouvelle technique, les chercheurs ont identifié les cellules de myélome multiple dormantes dans les os et ont analyser le transcriptome de ces cellules dormantes, c’est-à-dire qu’ils ont fait un instantané de tous les gènes qui sont activés dans la cellule et contrôlent la dormance.
Or, il apparaît qu'un grand nombre des gènes activés dans les cellules dormantes ne sont normalement pas activés dans ces cellules cancéreuses. D’autre part, l’activation de ces gènes montre à quel point il existe une étroite intrication du fonctionnement de la cellule cancéreuse dormante et de son microenvironnement. Enfin, il est désormais possible de cibler ces gènes pour détruire ces cellules.
Une nouvelle façon de cibler le cancer
Les chercheurs appliquent maintenant leur méthode pour recueillir des données sur les cellules cancéreuses dormantes dans d'autres types de cancer, dans l'espoir de trouver une signature commune qui leur permettrait de cibler toutes les cellules cancéreuses dormantes.
L'équipe travaille également à mettre au point des thérapies ciblées dirigées contre une des caractéristiques uniques des cellules dormantes, maintenant découvertes par cette recherche.
Il existe différentes approches pour cibler les cellules dormantes. L'une consiste à les maintenir en sommeil indéfiniment en créant un environnement qui les empêche de se réveiller. Une deuxième approche consiste à les réveiller délibérément, ce qui peut les rendre susceptibles d'être détruites par la chimiothérapie conventionnelle. Mais la meilleure approche serait d'utiliser cette connaissance des gènes qui maintiennent les cellules à l'état dormant pour les éradiquer pendant qu'elles sont dormantes. Cela empêcherait la maladie de réapparaître ou de rechuter, ce serait le « Saint Graal », d’après les chercheurs.








