Neurologie

Narcolepsie de type 1 : effet prometteur d’un agoniste du récepteur 2 de l’orexine

Chez les patients souffrant de narcolepsie de type 1, un agoniste du récepteur 2 de l'orexine permet de mieux améliorer les mesures de la somnolence et de cataplexie que le placebo, mais est associé à des effets hépatotoxiques.

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  • 28 Jul 2023
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    La narcolepsie est un trouble rare du système nerveux central qui se caractérise par une hypersomnolence chronique. Il existe deux grands types de narcolepsie : la narcolepsie de type 1 et la narcolepsie de type 2. La narcolepsie de type 1 d'origine auto-immune, est causée par un déficit sévère et définitif de neuropeptides de type orexines dans le cerveau.

    Dans un essai de phase 2 chez des patients souffrant de narcolepsie de type 1, un agoniste du récepteur 2 de l'orexine (OX2R), le TAK-994, permet de bien améliorer les mesures de la somnolence et de cataplexie par rapport à un placebo sur une période de 8 semaines, mais est associé à une hépatotoxicité. L'étude est publiée dans le New England Journal of Medicine.

    Un très fort signal d’efficacité

    Les chercheurs ont randomisé 73 patients pour qu'ils reçoivent le TAK-994, l’agoniste du récepteur 2 de l'orexine à une dose de 30 mg, 90 mg ou 180 mg, deux fois par jour, ou un placebo pendant 8 semaines. Takeda, le promoteur a annoncé qu'il avait interrompu l'essai après qu'un signal de sécurité hépatique ait déclenché une règle d'arrêt préspécifiée et cela a conduit à la fin au développement du TAK-994. Cependant, le signal d'efficacité de la réduction de la plupart des symptômes invalidants de la narcolepsie dans l'essai est particulièrement fort.

    Le principal critère d'évaluation était le changement dans la latence du sommeil lors du test de maintien de l'éveil, Maintenance of Wakefulness Test (MWT), de 40 minutes, qui teste la capacité à rester éveillé dans des situations soporifiques pendant la journée, une fonction qui est fortement altérée dans la narcolepsie. Ils ont analysé les données de tous les patients ayant reçu au moins une dose en utilisant des modèles mixtes linéaires, même si cela n'a concerné que 56% des patients qui avaient des données complètes. Ce pourcentage de données incomplètes est une source potentielle de biais qui pourrait légèrement surestimer un effet par ailleurs tout à fait remarquable. Pour les trois doses de médicament testées, les patients ont maintenu leur vigilance dans des conditions expérimentales pendant 31 à près de 40 minutes, apparemment en fonction de la dose, les durées de plus de 30 minutes étant considérées comme typiques pour des personnes en bonne santé.

    Un effet similaire sur la cataplexie a été observé, avec une réduction des crises à 1,2 par semaine dans le groupe recevant la dose de 30 mg, contre 10,6 par semaine dans le groupe recevant le placebo.

    Une pathologie auto-immune

    La narcolepsie est un trouble rare et chronique du système nerveux central qui se caractérise par une hypersomnolence diurne excessive pouvant être associée à des cataplexies, des hallucinations hypnagogiques ou hypnopompiques, des paralysies du sommeil et des perturbations du sommeil nocturne. Il existe deux grands types de narcolepsie : la narcolepsie de type 1 et la narcolepsie de type 2, la première est une pathologie auto-immune et se distingue par des symptômes de cataplexie et une perte des neurones producteurs d'orexine dans l'hypothalamus latéral.

    Des taux d'orexine faibles ou absents dans le liquide céphalorachidien permettent donc de poser le diagnostic de narcolepsie de type 1. Bien qu'une perte partielle de neurones à orexine ait été signalée chez certains patients ayant reçu un diagnostic de narcolepsie de type 2, les taux d'orexine dans le liquide céphalorachidien se situent dans la fourchette normale.

    Les traitements actuellement disponibles pour la narcolepsie comprennent des médicaments favorisant l'éveil (modafinil, armodafinil, solriamfétol, méthylphénidate et amphétamines), des médicaments ciblant principalement les transporteurs de dopamine ou de noradrénaline, ou les deux, pour la somnolence diurne excessive, et des inhibiteurs de la recapture adrénergique et sérotoninergique pour la cataplexie. Le pitolisant, qui cible les récepteurs H3 de l'histamine, et l'acide γ-hydroxybutyrique (sels d'oxybate), qui cible les récepteurs GABAB, sont également utilisés pour traiter la cataplexie et la somnolence diurne excessive.

    Les orexines, des neuropeptides très importants

    Les neuropeptides hypothalamiques latéraux - orexine A et orexine B, également connus sous le nom d'hypocrétines - ont été découverts par deux groupes en 1998. L'orexine A se lie sélectivement au récepteur 1 de l'orexine (OX1R), tandis que l'orexine A et l'orexine B se lient non sélectivement au récepteur 2 de l'orexine (OX2R). Les orexines augmentent la stabilité veille-sommeil et la vigilance, entre autres fonctions. Quelques années seulement après la découverte de l'orexine, la narcolepsie de type 1 a été reconnue comme un trouble caractérisé par une déficience en orexine, avec des taux d'orexine faibles ou absents dans le liquide céphalo-rachidien.

    Ces observations ont conduit au développement d'antagonistes de l'orexine pour traiter l'insomnie (par exemple, le suvorexant, lemborexant et le daridorexant) et d'agonistes de l'orexine pour traiter la narcolepsie de type 1 et éventuellement d'autres troubles de l'hypersomnolence. Le développement de médicaments contre la narcolepsie s'est concentré sur les agonistes de l'OX2R, car les souris knock-out OX1R ne présentent pas de symptômes de narcolepsie, alors que les souris knock-out OX2R en présentent.

    Une voie très prometteuse

    Malgré l'arrêt du développement de TAK-994, il est tout à fait justifié de poursuivre le développement des agonistes de l'orexine pour le traitement de la narcolepsie de type 1 et peut-être d'autres troubles d'hypersomnolence ou de décalage circadien, tels que le trouble du sommeil lié au travail par roulement ou le décalage horaire, pour lesquels des essais sont en cours.

    Un petit essai récent de sécurité portant sur une dose unique d'une version injectable d'un agoniste de l'orexine pour l'apnée du sommeil a amélioré les résultats du MWT d'une moyenne de 23 minutes à la dose la plus faible. Des effets tout aussi prometteurs, mais préliminaires, de perfusions à dose unique de l'agent ont été rapportés chez des personnes souffrant d'hypersomnie idiopathique. Cependant, les essais de ces agents ont montré des effets indésirables urinaires, principalement l'urgence et la pollakiurie. Il est intéressant de noter que les doses requises dans les études sur les agonistes de l'orexine pour obtenir une réduction des caractéristiques narcoleptiques semblent être beaucoup plus faibles chez les patients souffrant de narcolepsie de type 1 que chez ceux souffrant d'autres troubles d'hypersomnolence ou chez les personnes en bonne santé.

    Selon un éditorial associé à l’article, les résultats décrits dans le présent article peuvent être considérés comme un échec en raison de la fin prématurée de l'essai. Cependant, l'efficacité impressionnante est un grand espoir pour aider les patients souffrant de narcolepsie de type 1.

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    JDF