Cardiologie
AVK : la plupart des malades ne sont pas aux objectifs sans que rien ne change
Contrairement à une idée reçue, les malades sous AVK qui ont un INR stable au cours des premiers mois de traitement ne le gardent pas forcément. Un défaut qui ne remet pourtant pas leur place en cause.
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Les AVK existent depuis de nombreuses années et tant leurs qualités, que leurs défauts sont bien connus. Si leur efficacité sur la prévention des accidents thromboemboliques est avérée, leur marge thérapeutique étroite et leurs nombreuses interactions médicamenteuses et alimentaires rendent cette efficacité aléatoire sur le long terme. Pourtant, il était admis que les malades dont l’INR restait stable dans les 6 premiers mois allaient le garder. Une étude parue dans le JAMA le 9 août montre qu’il n’en est rien.
Une étude sur 3 ans
Cette étude prospective a inclus les malades qui ont reçu de la warfarine et ont eu au moins 3 mesures d’INR pendant les 6 premiers mois de traitements et au moins 6 pendant les 2 ans et demi de suivi ultérieur de l’étude.
Parmi les 3749 malades suivis, seuls 968 (26%) ont eu au moins 80% de mesures d’INR comprises entre 2 et 3 pendant les 6 premiers mois (= malades avec INR stable). Et, parmi ces malades avec INR stable peu nombreux, seuls 34% ont vu leur INR rester stable pendant les 2 ans et demi de suivi de l’étude. Surtout, la stabilité initiale a eu une valeur prédictive faible pour le maintien de la mesure de l’INR entre les valeurs cibles : parmi les malades avec INR stable au début, 36% ont eu ultérieurement au moins un épisode de mesure de l’INR en dehors des valeurs recommandées (2 à 3).
AVK : un traitement trop difficile à équilibrer
Les données s’accumulent pour montrer que les AVK sont des traitements qu’il faut surveiller par de nombreuses mesures car il sont très difficiles à équilibrer chez la plupart des malades et que malgré cela, surviennent des « sorties d’objectifs INR » et des accidents hémorragiques, parfois graves. A l’opposé, les preuves s’amoncellent pour démontrer l’intérêt des anticoagulants directs, et en particulier les anti-Xa, dont la variabilité, intra et interindividuelle, est faible, la surveillance inutile et les accidents hémorragiques moins fréquents et moins sévères. Pourtant, l’utilisation de ces nouvelles molécules reste partout entravée par les autorités de santé.
Le prix de l’innovation
Le problème n’est pas celui des antidotes, qui sont d’ailleurs en train d’arriver, car les AVK n’en n’ont pas vraiment. Le problème est bien sûr le prix, même si celui des AVK doit aussi prendre en compte la surveillance. Mais si le problème est le prix de l’innovation, il faut renverser la façon d’appréhender ce problème et négocier des prix plus bas, par exemple en échange d’un allongement de la durée des brevets : amortis sur un plus grand nombre d’année, le prix de la recherche pourra être plus bas.
La mauvaise solution des génériques
La politique de baisse des prix par les génériques est une politique de « gribouille » car elle favorise les pays avec industrie chimique, mais sans industrie pharmaceutique performante, et elle distord le prisme avec lequel sont désormais perçues les innovations. Les médecins et les malades sont culpabilisés par les prix et les autorités de santé usent de tous les moyens possibles permettant de limiter la diffusion de l’innovation en attendant des génériques … parfois encore chers.
Il est temps de reconnaître la véritable valeur des innovations, sans préjugé et pour l’utiliser au bénéfice des malades, mais avec une autre logique de contrôle des dépenses de santé.








