Oncologie
Cancers de l’ovaire platine-résistants : intérêt d’un inhibiteur d’ATR
Chez les patientes suivies pour un cancer de l’ovaire platine-résistant, l’association du berzosertib, inhibiteur de la kinase ATR, à la gemcitabine, augmente la survie sans progression, particulièrement chez les patientes très faiblement sensibles aux sels de platine, comparativement à la gemcitabine seule, avec une tolérance acceptable.
- PALMIHELP/istock
Les carcinomes séreux de haut grade de l’ovaire sont des tumeurs présentant de nombreuses altérations notamment au niveau du cycle cellulaire, des systèmes de réparation de l’ADN ainsi que la surexpression des drivers oncogéniques… responsables de dommages dans l’ADN.
En présence de ce « stress oncogénique », la Kinase ATR est habituellement surexprimée afin d’activer le système de réparation. De par sa propriété anti métabolite, la gemcitabine, semble être la drogue la plus appropriée en synergie avec les inhibiteurs d’ATR, afin d’induire l’apoptose.
Des patientes platine-résistantes pré-traitées.
L’étude de phase II, de Konstantinopoulos et al., publiée dans le Lancet, évaluant l’association berzosertib plus gemcitabine vs gemcitabine seule chez les patientes suivies pour un cancer de l’ovaire platine résistant, est positif concernant son critère de jugement principal, à savoir une augmentation de la survie sans progression.
En pratique, 70 patientes ont été randomisées : 36 dans le bras gemcitabine et 34 dans le bras gemcitabine + berzosertib. Les patientes devaient avoir une maladie platine-résistante, mais non réfractaire, possiblement traitée sans limitations de ligne de traitement en phase platine sensible, mais sans dépasser 1 ligne en phase platine résistante. Les inhibiteurs de PARP et anti VEGF étaient autorisés. La stratification se faisait en fonction de la durée de sensibilité aux sels de platine (<3 mois vs >3 mois mais <6 mois). Le schéma thérapeutique comportait une injection de Gemcitabine 1000mg/m2 au J1-J8, reprise J21 -/+ une injection de berzosertib 210 mg/m2 au J2-J9, reprise J21.
Comme on pouvait s’y attendre dans ce type de population, la majorité ne présentait pas de mutation BRCA (68% dans le bras expérimental vs 81% dans le bras standard), seulement 32% et 19% respectivement avaient reçu des inhibiteurs de PARP.
Un bénéfice surtout en cas de maladie très faiblement sensible aux sels de platine.
L’étude est positive concernant son critère de jugement principal : la médiane de PFS dans le bras expérimental est de 22.9 semaines vs 14.7 semaines dans le bras standard (HR 0,57, 90% CI 0,33–0,98 ; p=0,044). Ce résultat est appuyé dans le sous-groupe des patients présentant une sensibilité au platine de moins de 3 mois, avec une PFS médiane de 27.7 semaines vs 9 semaines respectivement dans le bras expérimental et standard (HR 0,29, 0,12–0,71;p=0,0087).
La même tendance est retrouvée en survie globale avec une médiane d’OS de 59.4 semaines dans le bras expérimental et 43 semaines dans le bras standard dans la population générale (HR 0.84, p=0.26), et de 84,4 et 40.4 semaines respectivement dans le sous-groupe avec sensibilité au platine de moins de 3 mois (HR 0,42, p=0,034). Pour autant, on observe un taux de réponse objective supérieur dans le bras standard comparativement au bras expérimental (11 % VS 3%) quel que soit la durée d’exposition aux platines.
Des toxicités acceptables.
Les toxicités observées ont été principalement hématologiques : neutropénie de grade 3-4 chez 47% des patientes du bras expérimental vs 39% dans le bras standard, thrombopénie de grade 3-4 chez 24% du bras gemcitabine + berzosertib vs 6% dans le bras gemcitabine seule. Dans chaque bras de traitements, il a été observé un décès toxique : l’un pour sepsis (bras standard) et l’autre pour pneumopathie (dans le bras expérimental).
Une piste thérapeutique dans d’autres tumeurs ?
Bien que préliminaires, ces résultats ne sont pas moins intéressants surtout dans une population de patientes où les alternatives thérapeutiques restent limitées. De plus, on peut espérer retrouver le même bénéfice dans toutes tumeurs pour lesquelles il existe une instabilité génétique et un stress oncogénique notables. On attend donc les données d’une étude à plus grande échelle.








