Intelligence artificielle
Atteinte d’un cancer du larynx, l'IA lui a rendu sa voix
Privée de sa langue et de son larynx à cause d'un cancer, une Américaine de 51 ans utilise une voix recréée par intelligence artificielle pour retrouver sa personnalité et sa capacité à interagir.
- Par Stanislas Deve
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- ArtemisDiana / istock
"Joyeux anniversaire", "je suis fière de toi", "je reviens tout de suite"... Ce sont quelques-unes des phrases que Sonya Sotinsky, une Américaine de 51 ans, a enregistrées avant de perdre sa langue et son larynx à cause d'un cancer agressif. Alors qu’elle est totalement privée de voix, elle parle aujourd'hui avec ses propres mots, son intonation, son humour et son "piquant", grâce à l'intelligence artificielle (IA).
Utiliser l'IA pour restituer la voix naturelle
Avant son opération en 2022, Sonya a enregistré, des heures durant, tout ce qu'elle pouvait : messages d’affection pour ses proches, lectures pour ses futurs petits-enfants, et même un florilège de sarcasmes et d'insultes. "Quand on ne peut plus parler, les autres projettent sur vous la personnalité qu'ils imaginent. C'est terriblement frustrant", explique-t-elle à KFF Health News. Dans ses enregistrements audios, elle a donc cherché à faire ressortir le maximum de son caractère : intonation de voix, cadence, accent du New Jersey...
"Votre voix est votre identité, rappelle Sue Yom, radio-oncologue à l'Université de Californie à San Francisco, où Sonya a reçu un traitement. La communication n'est pas seulement la façon dont nous nous exprimons et nous rapportons aux autres, mais aussi la façon dont nous donnons un sens au monde."L'électrolarynx, une solution mécanique qui produit une voix monotone, était inadapté au cas de Sonya. Elle a donc cherché, seule, une technologie capable de recréer sa voix naturelle. Après des mois de recherches, elle a trouvé une application capable d’utiliser l’IA de restituer un timbre personnalisé, expressif et émotionnel. "Elle a retrouvé son piquant", confirme sa fille Ela.
"Pouvoir dialoguer pleinement avec mon équipe médicale"
Mais le chemin reste semé d'embûches. Les assurances aux Etats-Unis refusent de rembourser les coûts de cette technologie, estimée à 3.000 dollars (2.580 euros), car elle n'est pas jugée "médicalement nécessaire". Et ce, alors même que la perte de voix entraîne isolement social, dépression et perte d'emploi, note KFF Health News.
Inspirée par l'histoire de Sonya, la chercheuse Jennifer De Los Santos prépare actuellement un essai clinique pour mesurer l'impact de ces voix artificielles sur la qualité de vie. "Comme pour la reconstruction mammaire, il faudra des années de plaidoyer et de preuves scientifiques pour que les assurances remboursent ces dispositifs", explique-t-elle.
Aujourd'hui, Sonya utilise son application Whisper pour communiquer avec ses médecins. Sa voix synthétique, humaine et claire, a même facilité l'élaboration de son nouveau plan de traitement contre le cancer. "Pouvoir dialoguer pleinement avec mon équipe médicale est vital", affirme-t-elle.










