Résistance aux antibiotiques

Les voyageurs peuvent ramener des bactéries super-résistantes

Une étude met en garde contre la consommation inappropriée d’antibiotiques en cas de turista. Car les voyageurs risquent d’importer des bactéries super-résistantes.

  • Par Valérie Van den Bos
  • DURAND FLORENCE/SIPA
  • 23 Jan 2015
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    Ils peuvent rapporter un cadeau de mauvais goût sans s’en apercevoir. Non pas dans leurs bagages, mais dans leurs intestins ! Les personnes voyageant dans certaines régions du monde risquent d’importer des bactéries super-résistantes aux antibiotiques. Tout simplement parce qu’elles ont pris des antibiotiques contre la turista durant leur voyage, alors que ce n’était pas nécessaire.

    Tel est le résultat d’une étude finlandaise publiée dans la revue Clinical Infectious Diseases. Anu Kantele, de l’université d’Helsinki, et ses collègues ont recueilli des prélèvements de selles auprès de 430 de leurs concitoyens, avant et après un voyage en dehors de la Scandinavie. Les chercheurs leur ont aussi demandé s’ils avaient eu une turista durant leur voyage et s’ils avaient été traités contre cette diarrhée avec des antibiotiques. La question était importante car les antibiotiques peuvent perturber la flore intestinale. Et comme cette barrière naturelle est fragilisée, des bactéries résistantes peuvent s’y loger.

    Un voyageur sur cinq concerné

    Les chercheurs ont trouvé que 21 % de ces personnes avaient hérité au cours de leur voyage de bactéries de la famille des entérobactéries, qui sont résistantes à de nombreux antibiotiques couramment utilisés. Ces bactéries s’appellent EBLSE (entérobactéries produisant la bêtalactamase à spectre étendu).

    Ces bactéries super-résistantes peuvent provoquer des infections sévères qui sont plus difficiles et plus coûteuses à traiter et qui peuvent conduire à des décès. Elles sont peu présentes dans les pays développés mais plus dans les pays en voie de développement. Chez ces voyageurs finlandais, seuls 1,2 % étaient porteurs d’EBLSE avant leur départ.

    Le risque le plus élevé en Asie du Sud

    La région géographique, la survenue d’une turista, l’âge et la consommation d’antibiotiques contre la diarrhée représentaient des facteurs de risque de colonisation par des EBLSE. Ainsi, 37 % de ceux ayant pris des antibiotiques contre une turista étaient porteurs de ces bactéries super-résistantes. Le risque le plus élevé était retrouvé chez les voyageurs en Asie du Sud ayant consommé des antibiotiques pour soigner leur diarrhée. 80 % d’entre eux étaient colonisés par des EBLSE. Les chercheurs soulignent qu’environ 300 millions de personnes voyagent dans des régions à haut risque chaque année.

    Le fait d’être porteur de ce type de bactéries ne signifie pas que les personnes vont forcément développer une infection. D’ailleurs, aucun des voyageurs finlandais colonisés n’était concerné, peut-être parce que le groupe étudié n’était pas assez important, selon les chercheurs. Ainsi, si le risque n’est pas forcément pour eux-mêmes, il l’est plus pour la collectivité. Ces voyageurs colonisés peuvent propager à leur entourage les bactéries super-résistantes à leur retour en Finlande.

    Selon les chercheurs, la grande majorité des cas de turista ne sont pas sévères et peuvent guérir tout seul. Ils mettent donc en garde contre la consommation inappropriée d’antibiotiques.

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    JDF