Psychiatrie

Schizophrénie et troubles bipolaires : le rôle de l’ADN non-codant

L’ADN non-codant du génome humain pourrait voir émerger de nouveaux gènes codant pour des protéines associées à la schizophrénie et aux troubles bipolaires. Au-delà d’une meilleure compréhension de ces 2 troubles, c’est une opportunité pour un meilleur diagnostic et de nouvelles cibles thérapeutiques.

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  • 29 Déc 2021
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    Des scientifiques de l’Université de Cambridge, qui étudient « l’ADN non-codant » c’est-à-dire l'ADN à l'extérieur des gènes, ont découvert des régions récemment évoluées qui codent pour des protéines associées à la schizophrénie et aux troubles bipolaires. Les résultats sont publiés dans la revue Molecular Psychiatry.

    Les chercheurs pensent que ces composantes génomiques de la schizophrénie et du trouble bipolaire sont spécifiques à l'homme et les régions nouvellement découvertes ne se trouvent pas dans les génomes d'autres vertébrés.

    Cette équipe a maintenant découvert 248 000 régions d'ADN en dehors des régions conventionnellement définies comme l’ADN codant, c’est-à-dire les gènes qui codent pour de nouvelles protéines, et qui sont anormales dans des maladies.

    Analyse de l’ensemble du génome humain

    En parcourant l'ensemble du génome humain, l'équipe de recherche du département de génétique de l'université de Cambridge a trouvé des régions de l’ADN, non classées comme gènes au sens traditionnel de l’ADN codant, qui pourtant créent des protéines qui seraient associées à la schizophrénie et aux troubles bipolaires,

    Cela ouvre la porte à de nouvelles cibles médicamenteuses et c'est passionnant, car personne n'avait encore jamais cherché au-delà de l’ADN codant (les gènes) des éléments pour comprendre et traiter ces 2 maladies.

    L’ADN non-codant, ex-« ADN poubelle »

    Il était admis, jusqu’à très récemment, qu’un gène codant pour une nouvelle protéine ne pouvait avoir comme origine qu’un gène déjà existant, une combinaison de fragments de gènes, ou le transfert d’un gène à partir d’une autre espèce.

    Une série d’études comparatives de génomes et de transcriptomes suggèrent qu’il existerait une autre source de gènes codant pour d’autres protéines : l’ADN non-codant appelé autrefois « ADN poubelle » car on n’en comprenait pas le rôle.

    Le mécanisme à l’origine de ces gènes codants « hors ADN codant » implique l’existence d’un continuum de protogènes entre ADN codant et non codant, correspondant à des états intermédiaires fixés par sélection naturelle. Ainsi, au cœur des génomes, des gènes pourraient émerger progressivement du néant par le seul jeu des mutations et de la sélection naturelle.

    Une nouvelle compréhension

    Lorsque l’on regarde au-delà des régions de l'ADN codant où se trouvent les gènes, on constate que ce serait l'ensemble du génome humain qui pourrait avoir la capacité à fabriquer des protéines, et pas seulement les gènes traditionnellement identifiés. L’équipe de recherche a découvert de nouvelles protéines qui interviendraient dans différents processus biologiques et qui seraient dysfonctionnelles dans des troubles comme la schizophrénie et le trouble bipolaire.

    Les scientifiques pensent que les « hot spots » du génome non-codant associés à ces troubles peuvent avoir évolué parce qu'ils ont des fonctions bénéfiques dans le développement cognitif des humains, mais que leur perturbation par des facteurs environnementaux entraînerait une susceptibilité à la schizophrénie ou aux troubles bipolaires, ou leur développement.

    Une nouvelle frontière

    La majorité des médicaments actuellement disponibles sont conçus pour cibler les protéines codées par les gènes. Ces nouvelles découvertes permettraient d'expliquer pourquoi la schizophrénie et les troubles bipolaires sont des affections héréditaires, et pourraient fournir de nouvelles cibles pour de futurs traitements.

    Par ailleurs, les symptômes de ces deux troubles les rendent parfois difficiles à distinguer et les chercheurs pensent que ces nouvelles protéines pourraient être utilisées comme indicateurs biologiques pour distinguer les deux affections, voire identifier les patients plus enclins à la psychose ou au suicide.

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    JDF