Rhumatologie

Polyarthrite rhumatoïde : le régime méditerranéen réduirait l’activité

L’impact positif d’un régime anti-inflammatoire, qu’il soit végétarien ou méditerranéen, sur la polyarthrite rhumatoïde a été rapporté dans plusieurs études au cours du dernier congrès américain de rhumatologie, l’ACR 2019.

  • AaronAmat/istock
  • 16 Déc 2019
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    Au cours de la polyarthrite rhumatoïde (PR), un régime végétarien ou un régime méditerranéen, avec forte consommation d'huile d'olive, de céréales non raffinées, de fruits et légumes frais ou secs, de poisson, de produits laitiers et avec une quantité modérée de vin rouge, seraient associés à une réduction modeste mais significative du risque d’avoir la maladie (Abstract 192 et 193).

    Une autre étude (Abstract 458) montre une association entre un bon suivi du régime méditerranéen et une réduction de l’activité de la maladie. Les perturbations du microbiote intestinal (dysbiose, Abstract 54), qui sont évolutives au cours de la maladie (Abstract 37), peuvent faire le lien entre régime diététique et polyarthrite rhumatoïde. Ces résultats sont issus de différentes études présentées au récent congrès américain de rhumatologie, l’ACR 2019, à Atlanta.

    Nurses' Health Study

    Des chercheurs de Harvard ont étudié de façon prospective 79 465 femmes dans le cadre de la Nurses' Health Study (NHS I) (1984-2012) et 95 741 femmes du NHS II (1991-2011) qui n'avaient pas de PR au départ. Au cours d’un suivi représentant plus de 3 421 592 années-personnes, 1 091 femmes ont développé une PR.

    Dans les modèles ajustés selon l'âge, les femmes ayant le taux d'observance le plus élevé pour un régime alimentaire sain à base de plantes ont un risque réduit de 18% de PR (quartile 4 vs quartile 1 de l'apport alimentaire, HR = 0,82 ; IC à 95 % = 0,69- 0,97, p =0,01). Dans le modèle ajusté multivarié, l'association était atténuée (HR=0,84 ; IC à 95 % = 0,70 - 1,01, p =0,05), en particulier en cas d’ajustement pour l'IMC. Ces résultats sont confirmés par une méta-analyse sur les publications des 30 dernières années (Abstract 193).

    Etude monocentrique italienne

    Dans une étude monocentrique sur 205 patients avec PR (53 ans d’âge médian), avec une durée d’évolution de 12 ans, un facteur rhumatoïde et/ou anticorps protéiques anti-CCP positifs dans 58,5% des cas et des lésions radiographiques chez 41,8% d’entre eux, une corrélation positive significative a été trouvée entre l’observance du régime méditerranéen et l’état général (Abstract 458).

    Bien que non statistiquement significative, une corrélation négative a été observée avec DAS28 et SDAI, ce qui suggère une association entre une observance élevée du régime méditerranéen et une activité de la maladie plus faible.

    Une histoire ancienne

    Des études épidémiologiques avaient suggéré qu'une alimentation riche en poisson, en huile d'olive et en légumes cuits pourrait avoir un effet protecteur contre la PR. Le régime méditerranéen, en particulier le régime traditionnel de Crète, a été considéré comme particulièrement anti-inflammatoire.

    Ce régime, qui se caractérise par une teneur élevée en céréales, légumes, légumineuses, fruits et huile d'olive, a été capable de réduire le taux de récidive des événements cardiaques au cours de l’athérosclérose, une maladie qui, comme la PR, a une forte composante inflammatoire.

    Une seule étude randomisée de bonne qualité

    Différentes études ont été réalisées au fil du temps, mais la seule étude de bonne qualité méthodologique a été réalisée par une équipe suédoise. Il y a plus de vingt ans, Sköldstam et ses collaborateurs ont mené le premier essai contrôlé randomisé testant l'effet du jeûne et du régime lacto-végétarien chez des patients atteints de PR.

    Ils avaient rapporté que le jeûne entraînait une réduction spectaculaire de l'activité de la maladie mais, malheureusement, les patients recommençaient de nouveau à souffrir quand ils recommençaient à manger.

    Depuis, seuls quelques essais contrôlés randomisés sur le traitement diététique des patients atteints de PR ont été réalisés. Ces essais ne sont pas directement comparables en raison des différences dans les régimes alimentaires et, par conséquent, les résultats ont varié « d'aucun effet » à une « bonne réponse clinique » au régime méditerranéen.

    Comment marche le régime dans la PR ?

    On a beaucoup spéculé sur les raisons pour lesquelles certains patients atteints de PR s'amélioraient en modifiant leur alimentation. Des réactions allergiques ou d'autres réactions indésirables à l'égard de certains aliments ont été suggérées, mais semblent n'avoir un rôle que chez un très petit nombre de patients atteints de PR.

    Une modification significative de la flore intestinale, ou microbiote intestinal, serait associée à une amélioration clinique chez les patients atteints de PR au cours d'un régime alimentaire favorisant le développement des populations bactériennes anti-inflammatoires.

    Par ailleurs, le régime méditerranéen est constitué d’aliments anti-inflammatoires (par comparaison à un régime riche en viande et charcuterie qui est lui pro-inflammatoire). Il est possible que l'absorption de certains produit sécrétés par certaines populations bactériennes ait un rôle sur l'activité de la maladie.

    De toute façon c’est aussi bon pour la santé

    La croyance que l'alimentation peut influencer la gravité de la polyarthrite rhumatoïde fait partie du folklore de la maladie, et le traitement diététique a été l'un des nombreux remèdes non conventionnels qui ont été largement utilisés en Europe du Nord. Au fil des ans, plusieurs articles sur des patients ayant une PR et qui ont connu une amélioration spectaculaire de leur maladie après un changement de régime alimentaire ont parus non seulement dans la presse grand public, mais aussi dans des revues scientifiques.

    Bien que les avantages possibles d'un régime alimentaire spécifique pour les patients atteints de PR aient été testés dans un certain nombre d'essais, bon nombre des études qui ont montré des résultats positifs du traitement diététique n'ont pas été publiées sous forme d'articles complets dans des revues avec comité de lecture, parce que ces études ne comportaient pas de groupe contrôle ou étaient mal conçues. Les études contrôlées et correctement menées sont très peu nombreuses. L’ACR 2019 a apporté quelques études supplémentaires intéressantes mais pas réellement décisives.

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    JDF