Pneumologie

CBNPC de petite taille : supériorité de la segmentectomie

La segmentectomie est efficace dans le cancer bronchopulmonaire non à petites cellules inférieur 3 cm à prédominance de verre dépoli. D’excellents résultats d’une étude asiatique mais la transposition des résultats à des populations européennes est à faire. Le seuil de dimension indiquant la chirurgie par segmentectomie reste à définir. D’après un entretien avec Marco ALIFANO.

  • 15 Jun 2023
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    Une étude japonaise, dont les résultats sont parus en mars 2023 dans le Lancet Respiratory Medicine (JCOG 1211), a cherché à évaluer l’efficacité et la sécurité de la segmentectomie, utilisée pour traiter les tumeurs bronchiques non à petites cellules de diamètre inférieures à 3 cm, à composante unique ou prédominante en verre dépoli. Il s’agit d’un essai a bras unique multicentrique mené au sein de 42 établissements japonais. Au total, 396 patients ont été inclus entre 2013 et 2015 et 357 d’entre eux ont pu effectivement avoir une segmentectomie, avec curage ganglionnaire hilaire, interlobaire et intrapulmonaire. Les patients inclus étaient âgés de 20 à 79 ans, avaient un bon Performans Status et des tumeurs de stade cIA, de 3 cm maximum de grand axe, à composante unique ou prédominante en verre dépoli, confirmée par le scanner en coupes fines. Le critère principal d’évaluation était la survie sans rechute à 5 ans.

     

    Des résultats attendus

    Le professeur Marco ALIFANO, chef du service de Chirurgie Thoracique de l’Hôpital Cochin, à Paris, explique que la segmentectomie est une chirurgie reconnue du cancer bronchique non à petites cellules dans certaines conditions et que cette étude vient confirmer cela. Il précise que les auteurs de ce travail ont choisi des conditions idéales pour leur étude : le cancer des patients inclus était de bon pronostic, la tumeur était inférieure à 3 cm et avait une composante principale (ou unique) en verre dépoli. Marco ALIFANO souligne que les équipes asiatiques se sont intéressées avec beaucoup d’avance à la problématique des lésions en verre dépoli. La communauté attendait la publication de cette étude, qui fait suite à une publication parue récemment concernant un essai de stade III comparant cette fois-ci la segmentectomie à la lobectomie pour des nodules de 2 cm de diamètre au maximum et pouvant avoir une composante en verre dépoli supérieure à 50% ; cette étude avait démontré la non infériorité de la segmentectomie pour des tumeurs potentiellement plus agressive, bien que de taille maximal inférieure à celle  évaluée dans l’étude JCOG 1211 .

    Marco ALIFANO précise que, dans l’étude actuelle, qui est réalisée avec un effectif suffisamment important, d’excellents résultats sont rapportés avec 98% de survie libre de rechute à 5 ans pour des tumeurs allant jusqu’à 3 cm de grand axe en verre dépoli ou à composante dominante en verre dépoli. Ceci confirme que la segmentectomie représente le geste chirurgical de choix dans ces conditions, surtout pour les populations étudiées.

     

    Un seuil chirurgical encore à définir

    Marco ALIFANO estime que les résultats de cette étude apportent la confirmation de l’intérêt de la segmentectomie pour les tumeurs inférieures à 3 cm à composante unique ou prédominante en verre dépoli, mais qu’elle ne répond pas à la question du seuil à partir duquel, la chirurgie est le traitement de choix pour les tumeurs à composante unique ou prédominante en verre dépoli.

    Il rappelle par ailleurs qu’il existe des différences entre les populations asiatiques et les populations occidentales et que, de ce fait, les attitudes thérapeutiques pourraient être également différentes. En effet, des séries européennes qui se sont penchées sur l’histologie des lésions en verre dépoli ont montré que dans les populations européennes, l’anatomo-pathologie retrouvait souvent une composante invasive contrairement à ce qui est observé dans les populations asiatiques.   Marco ALIFANO explique donc que si l’agressivité histologique a un impact pronostique, les résultats européens d’éventuelle études de segmentectomie pour des lésions à composante unique ou prédominante en verre dépoli jusqu’à 3 cm pourront être plus mitigés.

    En conclusion, la segmentectomie apparait comme être le traitement de choix des cancers bronchiques non à petites cellules inférieurs à 3 cm pour les populations asiatiques, mais les différences histologiques qui peuvent être observées ne rendent pas ces résultats immédiatement extrapolables à des populations européennes pour lesquelles des études spécifiques semblent nécessaires.

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    JDF