Cardiologie
HTA : les associations en 1ère ligne dans les recommandations de traitement
Les recommandations internationales sur l’hypertension artérielle mettent en avant le recours à la mesure de la pression artérielle hors cabinet du médecin pour confirmer le diagnostic et plaident pour un traitement médicamenteux précoce au moyen d’une association fixe dès la première ligne.
- Ivan-balvan/istock
Les recommandations 2020 de l’ISH mettent en avant le recours à la mesure ambulatoire sur 24 heures ou à l’automesure pour confirmer le diagnostic de l’hypertension artérielle hors cabinet du médecin. Elles plaident également pour un traitement médicamenteux précoce au moyen d’une association fixe dès la première ligne, avec un bloqueur du système rénine-angiotensine (IEC ou ARB) et un antagoniste calcique.
L’objectif est d’obtenir une pression artérielle inférieure à 130/80 mmHg chez les hypertendus de moins de 65 ans qui le tolèrent. Chez les hypertendus de plus de 65 ans on visera une pression artérielle inférieure à 140/ 80 mmHg.
Baisser la pression artérielle systolique de 10 mmHg ou la pression artérielle diastolique de 5 mmHg réduirait, en effet, le risque d’insuffisance cardiaque de 40%, celui d’AVC de 35%, celui d’événement coronarien ou d’événement cardiovasculaire majeur de 20%, et la mortalité totale de 10-15%.
Pas de nouvelle définition de l’HTA
En dépit de l’étude SPRINT et des méta-analyses successives, les recommandations de l’ISH 2020 gardent la même définition de l’hypertension et le même seuil d’intervention, mais après des mesures répétées de la pression artérielle, y compris hors du cabinet médical. Elles adaptent également la définition de l’HTA à la méthode de mesure. Le recours à la mesure ambulatoire (ABPM) ou à l’automesure (HBPM) de la pression artérielle permettent d’arriver plus vite au diagnostic d’hypertension artérielle et donc d’entamer plus rapidement un traitement médicamenteux chez les patients à haut risque cardiovasculaire. Or, la rapidité avec laquelle le contrôle tensionnel est obtenu serait un facteur de bon pronostic.
Par rapport à 140/90 mmHg mesurés au cabinet médical, les seuils sont désormais de 130/80 mmHg sur l’ABPM moyenne de 24 h et de 135/85 mmHg en HBPM.
La comparaison des mesures réalisée au cabinet du médecin par rapport à celles de l’ABPM ou de l’HBPM permet de définir 4 catégories de patients : les normotendus vrais, les hypertendus vrais, les patients avec une hypertension blouse blanche (30-40% des hypertendus) et les patients avec une hypertension masquée (15% des normo-tendus en consultation).
Stratification du risque cardiovasculaire
La stratification du risque cardiovasculaire des patients est importante en vue de la décision de le traiter et de l’évaluation de son pronostic. Elle est donc réalisée chez tout hypertendu à partir de ses antécédents et du niveau tensionnel.
Les hypertendus qui ont un antécédent cardiovasculaire, un diabète compliqué ou une clairance de la créatinine inférieure à 30 ml/min/1/73 m2 sont à très haut risque cardiovasculaire. Les hypertendus qui ont un diabète non compliqué, une lésion organique secondaire à l’hypertension ou une clairance de la créatinine inférieure à 60 ml/min/1.73 m2 sont à haut risque cardiovasculaire. Enfin, les hypertendus qui ont une hypertension artérielle de grade 3 (supérieure à 180/110 mmHg) sont au moins à haut risque cardiovasculaire.
Chez les patients sans antécédent cardiovasculaire, ni diabète, ni insuffisance rénale ni lésion organique due à l’hypertension, la stratification du risque cardiovasculaire peut se faire au moyen du SCORE européen. Contrairement à ce qui a été longtemps dit, l’hypertension blouse blanche n’est pas bénigne : le pronostic de ces patients, s’il est meilleur que celui des hypertendus vrais est aussi moins bon que celui des normo-tendus vrais.
Le traitement hygiéno-diététique est systématique
Tous les hypertendus doivent commencer par un traitement hygiéno-diététique. Un traitement antihypertenseur ne sera prescrit d’emblée que chez les patients dont la pression artérielle est supérieure à 160/100 mmHg, (quel que soit leur âge) et chez les patients à haut risque cardiovasculaire dont la pression artérielle est supérieure à 140/90 mmHg.
Les hypertendus à risque faible ou modéré et de moins de 80 ans dont la pression artérielle est supérieure à 140/90 mmHg ne se verront prescrire un traitement médicamenteux que s’ils restent hypertendus malgré un traitement hygiéno-diététique bien suivi pendant au moins 3 mois. Un traitement en cours ne doit pas être interrompu au-delà de 80 ans.
Les hypertendus dont la pression artérielle est de 135-139/85-89 mmHg sous traitement hygiéno-diététique ne doivent pas recevoir de traitement médicamenteux, à l’exception de ceux à haut risque cardiovasculaire si un renforcement du traitement hygiéno-diététique ne réduit pas leur pression artérielle.
Conduite du traitement antihypertenseur
Les recommandations européennes reposent toujours sur 5 grandes classes d’antihypertenseurs : les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC), les antagonistes du récepteur de l’angiotensine (ARB), les inhibiteurs calciques, les bêtabloquants et les diurétiques. La nouveauté vient du fait qu’elles placent en 1ère ligne une association fixe (IEC ou ARB, associé dans le même comprimé à un antagoniste calcique) à faible dose. La dose de ces associations sera ensuite montée en cas d’échec.
La justification de ce choix repose sur la nécessité d’un traitement combiné chez la plupart des patients, la volonté d’obtenir un contrôle tensionnel plus rapide, ce qui améliore le pronostic et la meilleure compliance en simplifiant le traitement et en obtenant un contrôle tensionnel rapide.
Si la bithérapie initiale n’est pas suffisante, il faudra recourir à une trithérapie associant IEC ou ARB + antagoniste calcique avec un diurétique. Les diurétiques thiazidiques, la chlortalidone et l’indapamide peuvent être utilisés avec une nouveauté également : la préférence de l’ISH pour la chlortalidone et l’indapamide par rapport aux thiaziques qui ont un niveau de preuve d’efficacité inférieur et plus d’effets secondaires. Ils peuvent entraîner un risque d’insulinorésistance mais celui-ci pourrait être réduit par la supplémentation potasique ou les diurétiques d’épargne potassique. Si la clairance de la créatinine est inférieure à 30 ml/min/1.73 m2 il peut être nécessaire d’administrer un diurétique de l’anse pour obtenir un plein effet hypotenseur.
Les bêtabloquants seraient moins efficaces dans la prévention des AVC et dans la prévention ou la régression de l’hypertrophie ventriculaire gauche et ne devraient donc être prescrits que s’il existe une indication particulière (angor, contrôle du rythme cardiaque, post-infarctus, décompensation cardiaque…) ou une indication ethnique.
Objectifs du traitement et ajustement
L’objectif est d’abord d’obtenir une pression artérielle inférieure à 140/90 mmHg chez tous les patients, ce qui ne serait le cas que pour moins de la moitié des hypertendus traités actuellement.
Les méta-analyses récentes et les résultats de l’étude SPRINT suggèrent d’atteindre un objectif plus bas dans certaines circonstances ce que valident les recommandations avec un objectif de :
- Pression artérielle systolique entre 120 et 129 mmHg chez les hypertendus de moins de 65 ans qui le tolèrent ;
- Pression artérielle de 130-139 mmHg chez les hypertendus âgés de plus de 65 ans et les insuffisants rénaux qui le tolèrent ;
- Pression artérielle diastolique entre 70 et 79 mmHg dans tous les cas.
En cas de persistance d’une pression artérielle supérieure à 140/90 mmHg malgré la prise de 3 médicaments ou plus, dont un diurétique, on évoquera une hypertension artérielle résistante, mais son diagnostic devra être confirmé en éliminant les problèmes de mesure (artères non compressibles ou brassard trop étroit), en vérifiant la compliance au traitement (interrogatoire, questionnaires spécifiques, dosage sanguin ou urinaire des antihypertenseurs) et par la réalisation d’une mesure ambulatoire ou une automesure de la pression artérielle.
En l’absence de cause d’hypertension secondaire identifiée (qu’il conviendrait alors de traiter), les recommandations de l’ISH proposent l’adjonction à la trithérapie d’un antagoniste du récepteur des minéralocorticoïdes (spironolactone 25-50 mg/j) pour autant que la clairance de la créatinine soit supérieure à 45 ml/min/1.73 m2 et que la kaliémie soit inférieure à 4.5 mEq/l. L’éplérénone ou l’amiloride peuvent être une alternative si les effets anti-androgéniques de la spironolactone sont mal tolérés.











