Onco-digestif
TEP en oncologie digestive : une entrée timide mais certaine dans les recommandations
La place de la tomographie à émission de positons (TEP) dans la prise en charge des cancers digestifs est déterminée par les recommandations du TNCD et de l’ESMO, mais est amenée à évoluer avec les améliorations technologiques actuelles de la nouvelle génération des TEP numériques et l’optimisation par l’injection de produit de contraste pour la TDM couplée.
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Les recommandations du TNCD et de l’ESMO déterminent la place de la tomographie à émission de positons (TEP) dans la prise en charge des cancers digestifs.
A l’exception de l’adénocarcinome du pancréas et du CHC, la TEP au 18Fluorodesoxyglucose (FDG) est recommandée, le plus souvent optionnelle ou conditionnelle, pour le bilan d’extension des cancers digestifs supposés curables. Elle n’a pas d’intérêt si la situation oncologique est au préalable multimétastatique connue et est actuellement non recommandée pour l’évaluation de la réponse thérapeutique
La TEP dans les cancers de l’Œsophage
La TEP au FDG est incontournable dans le bilan initial du carcinome de l’œsophage (épidermoïde ou adénocarcinome) en situation supposée curable. Elle complète le bilan d’extension en recherchant une atteinte ganglionnaire régionale (de la région cervicale péri-œsophagienne jusqu’en cœliaque) et/ou une atteinte métastatique (sus claviculaire, lombo aortique, et plus à distance).
Malgré plusieurs études encourageantes, la TEP n’est actuellement pas validée pour l’évaluation thérapeutique précoce, principalement en raison d’une hétérogénéité de réalisation et d’interprétation métabolique quantitative et l’absence de stratégie d’escalade ou de désescalade thérapeutique basée sur la TEP. Elle est cependant recommandée pour le diagnostic d’une récidive avec une forte sensibilité.
La TEP dans les cancers de l’estomac
La TEP au FDG a fait son entrée dans les recommandations ESMO en bilan initial de l’adénocarcinome de l’estomac (hors forme diffuse/mucineuse/ à cellules indépendantes) en situation supposée curable afin de compléter le bilan d’extension notamment à la recherche d’une atteinte métastatique lomboaortique et plus à distance.
Sa place est cependant remise en question par les recommandations plus récentes du TNCD, la limitant en option au cas par cas.
La TEP dans les cancers du foie
En raison de la présence dans les hépatocytes d’une glucose-6-phosphatase empêchant l’accumulation du FDG en intra cytoplasmique, l’activité métabolique hépatique visible à la TEP au FDG est nettement sous-estimée. Ainsi la TEP au FDG n’a pas de place recommandée pour le bilan diagnostique d’une lésion hépatique ni dans la prise en charge du carcinome hépato cellulaire.
Cependant l’hypermétabolisme du CHC, quand il est visible à la TEP au FDG, est corrélé à la dédifférenciation tumorale (perte de la glucose-6-phosphatase) et est ainsi un marqueur de mauvais pronostic La TEP à la Choline, plus sensible pour le CHC, n’est également pas recommandée.
La TEP dans les cancers des voies biliaires
La TEP au FDG est non recommandée pour le bilan diagnostique d’une lésion des voies biliaires. Bien que très performante pour le cholangiocarcinome, elle est seulement optionnelle et discuté au cas par cas pour le bilan d’extension, notamment si doute métastatique et si un traitement curatif est envisagé.
La TEP dans les cancers du pancréas
L’activité métabolique visible en TEP au FDG de l’adénocarcinome pancréatique parait trop souvent faible, discordante avec l’agressivité connue de ce cancer. La TEP est vraisemblablement prise en défaut par un caractère parfois pauci-cellulaire ou mucineux de l’adénocarcinome du pancréas ou est souvent de réalisation délicate ou altérée en cas de diabète secondaire mal équilibré. Pour ces raisons, la TEP au FDG n’est pas recommandée pour la caractérisation d’une lésion pancréatique ni dans la prise en charge d’un adénocarcinome du pancréas.
La TEP dans les cancers du colon
Bien que performante dans le bilan d’extension de l’adénocarcinome d’origine colique, avec une histologie tumorale très avide en FDG, la TEP au FDG n’a pas montré de supériorité dans le bilan d’extension initial par rapport au bilan conventionnel.
La TEP est réservée en option au bilan d’extension si une résection métastatique hépatique est envisagée, pour la localisation d’une récidive en cas d’élévation isolée de l’ACE et pour le diagnostic d’une récidive locale après traitement hépatique focal si doute à l’imagerie morphologique.
La TEP dans les cancers du rectum
Bien que l’adénocarcinome du rectum ait une forte avidité pour le FDG, la TEP est proposée en option pour le bilan d’extension métastatique, surtout si élévation importante de l’ACE, si atteinte vasculaire extramurale décrite à l’IRM, et si doute à l’imagerie morphologique sur une atteinte secondaire. La TEP peut également être utile pour la planification de la radiothérapie et pour le diagnostic de récidive locorégionale.
La TEP dans les cancers du canal et marge anale
Bien qu’en pratique souvent réalisée, la TEP au FDG reste optionnelle pour le bilan d’extension des cancers épidermoïdes du canal et de la marge anale. Très sensible pour la détection de l’atteinte ganglionnaire régionale et des sites métastatiques, elle manque malheureusement de spécificité pour la région inguinale notamment chez les patients présentant une polyadénopathie du VIH associée. Elle a toute son utilité pour la planification de la radiothérapie et est utile, mais également optionnelle, pour évaluer la réponse à la fin du traitement conservateur par chimio-radiothérapie.
La TEP dans les tumeurs stromales gastro-intestinales
La TEP au FDG est optionnelle pour le bilan d’extension avec un intérêt seulement si doute sur une situation métastatique à l’imagerie morphologique. Son utilité est rapportée pour l’évaluation précoce sous thérapie ciblée, mais nécessite au préalable une TEP baseline pour confirmer le caractère hypermétabolique, donc évaluable, de la tumeur, une part significative des GIST étant initialement peu métaboliques.
La TEP dans les tumeurs neuroendocrines digestives
Compte tenu de la disponibilité du Parc de machine TEP en France, la scintigraphie n’a plus sa place dans la prise en charge des TNE, remplacée par les radiotraceurs TEP. La TEP au FDG a une forte valeur pronostique, elle est cependant optionnelle pour toutes les TNE mais est particulièrement intéressante pour les grades 2-3 et pour les CNE. La TEP des récepteurs aux analogues de la somatostatine (68Ga–DOTATOC/DOTATATE/DOTANOC) est recommandée dans la prise en charge des TNE (non recommandée pour les CNE) pour le bilan d’extension, en pré thérapeutique des analogues de la somatostatine, et en pré thérapeutique de la radiothérapie interne vectorisée (LUTATHERA).
La TEP des récepteurs aux analogues de la somatostatine est recommandée pour le suivi des TNE mais semble cliniquement pertinente si suspicion de récidive. La TEP FDOPA est recommandée pour le bilan d’extension des TNE de l’intestin et du colon car plus performante que la TEP des récepteurs aux analogues de la somatostatine pour ces localisations aillant pour origine l’intestin primitif moyen.
Perspectives et conclusions
Les améliorations technologiques actuelles de la TEP avec la nouvelle génération des TEP numériques et l’optimisation par l’injection de produit de contraste pour la TDM couplée, vont amener à une réévaluation des performances de la TEP au FDG pour les indications d’oncologie digestive et ainsi de sa place dans les recommandations. Le développement de nouvelles lignes thérapeutiques efficaces en oncologie digestive font espérer des stratégies d’escalades ou de désescalade thérapeutique basées sur l’évaluation métabolique quantitative précoce en TEP.











