Diabétologie
Diabète de type 1 : quel impact du confinement sur le retard au diagnostic ?
Nous commencons tout juste à évaluer les conséquences du confinement. Quels sont les impacts sur le diagnostic du diabète de type 1, notamment chez les plus jeunes ? Voici des données de 3 pays "européens" : UK, Allemagne et Italie italienne
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Durant le confinement imposé entre les mois de mars et mai pour juguler l’épidémie de COVID-19, les accueils d’urgences générales, ainsi que les centres médicaux libéraux, ont enregistré un effondrement du nombre de consultations, faisant craindre des retards au diagnostic. Trois études allemande, anglaise et italienne, ont étudié la question concernant le diagnostic du diabète de type 1 chez les moins de 16 ans. L’étude allemande (portant sur un registre national) identifie une augmentation de 80% d’acido-cétose au diagnostic dans toutes les tranches d’âge, et presqu’un doublement des formes graves chez les moins de 6 ans. A l’inverse, l’étude italienne (75% des centres pédiatriques nationaux) ne retrouve pas d’augmentation d’acido-cétose globale. En revanche, il ne semble pas y avoir d’augmentation anormale du nombre de diagnostics de diabète de type 1.
L’évolution du taux d’acido-cétose dépend du pays étudié
En Allemagne, le taux d’acido-cétose a presque doublé par rapport aux années précédentes, passant de 24% en 2018 et 2019 à 45% durant le COVID-19 (mi-mars à mi-mai pour chaque année). De même, une acido-cétose sévère (pH < 7,10 ou bicarbonates < 5 mmol/L) était présente chez 19% des patients, contre 14 et 12% en 2018 et 2019. Alors que l’augmentation d’acido-cétose au diagnostic concernait tous les âges entre 0 et 16 ans, l’augmentation des formes sévères ne concernait que les enfants de moins de 6 ans (risque relatif ajusté sur le sexe et le statut d’immigrant 2,06 et 1,90 par rapport à 2018 et 2019, p = 0,01 et 0,02 respectivement).
En Italie, une enquête par email de 75% des centres pédiatriques du pays retrouve une diminution de 23% du nombre de diagnostics de diabète de type 1, avec une proportion acido-cétose au diagnostic similaire à 2019 (40% environ). En revanche, parmi les cas d’acido-cétoses, 44% sont sévères cette année contre 36% l’année précédente (p=0,03).
Enfin, en Angleterre, 5 centres de la région de Londres retrouvaient une acido-cétose dans 70% des diagnostics, dont la moitié en acido-cétose sévère, sans pouvoir comparer à des données antérieures. Surtout, sur 5 enfants testés pour le COVID (PCR lors de l’hospitalisation, ou sérologie à postériori), 3 ont présenté une hypokaliémie réfractaire dont un avec un arrêt cardiaque (sans séquelle après ressuscitation). En comparant aux 5 années précédentes, les auteurs estiment une augmentation de 80% des nouveaux cas, liés à un clustering dans deux des 5 centres.
De l’importance de registres nationaux
Les résultats de ces trois études, en partie divergents, souligne l’importance de registres nationaux tel que rapporté en Allemagne. En Angleterre, l’augmentation de 80% de diagnostics de diabète de type 1 est liée uniquement à 2 centres sur les 5 étudiés, avec de faibles effectifs absolus. On peut imaginer un possible biais de sélection, avec modification des parcours de soins dans ce contexte sanitaire particulier, et des patients consultant dans cet hôpital plutôt qu’un autre. Un registre national, ou au moins régional, aurait pu préciser l’évolution ou la stabilité du nombre de cas à une plus grande échelle.
En Allemagne, l’étude du registre national rapporte une augmentation plus faible entre 2019 et 2020 qu’entre 2018 et 2019. Ces comparaisons montrent l’importance de prendre du recul en épidémiologie, une évolution d’une année sur l’autre étant à intégrer dans une analyse plus globale. L’Italie, dans une étude nationale, retrouve même une diminution.
Que retenir de cette expérience pour les prochains mois ?
Devant un possible retour de mesures de confinement, ou de familles reportant une consultation médicale en raison de la propagation du virus durant l’hiver, que pouvons-nous retenir de l’expérience des mois de mars à mai ? Tout d’abord, il n’y a pas eu d’augmentation inhabituelle du nombre de diabète de type 1 nouvellement diagnostiqué à grande échelle de mars à mai 2020, sous réserve d’une confirmation sur une plus longue durée, dans l’hypothèse de mécanismes viraux accélérant le diagnostic d’un diabète de type 1.
Concernant le retard au diagnostic, il semble être plus important lorsque le taux d’acido-cétose au diagnostic est habituellement faible. Ainsi, en Allemagne ce taux double presque de 24 à 45%, alors qu’en Italie il reste stable aux alentours de 40%. En résumé, les bons élèves rejoignent les mauvais élèves, mais sans non plus faire plus mauvais.











