13 reasons why : "Une série à regarder avec les adolescents"

La nouvelle série de Netflix, 13 reasons why, a créé l’événement chez les adolescents. En quelques jours, ils ont dévoré les 13 épisodes adaptés du roman éponyme (2009) de l’écrivain américain Jay Asher. Et depuis fin mars, les réseaux sociaux sont pris d’assaut par des les discussions de ces jeunes téléspectateurs.

Un engouement qui interpelle car la série est loin d’être une comédie ou un show de science-fiction. Elle évoque le suicide troublant d’une adolescente, Hannah Baker, qui a pris soin d’enregistrer des cassettes audio pour expliquer son geste. Cyberharcélement, viol, humiliation… 13 raisons que le public découvre en même temps que Clay, un lycéen amoureux de la jeune fille.

Cette série porte un regard juste sur les émotions et les sentiments qui traversent cette période de la vie, estime le Dr Xavier Pommereau, chef du Pôle aquitain de l'adolescent au CHU de Bordeaux. Mais le psychiatre critique la description caricaturale du processus suicidaire, et invite les parents et les médecins à analyser la série avec les adolescents.

Quel regard portez-vous sur la série ?
Dr Xavier Pommereau : Je la trouve plutôt bien faite et bien filmée. Elle reproduit assez bien l’univers de la pensée adolescente même si un certain nombre de choses sont caricaturales. Mais c’est justement une vision très proche de celle des adolescents, ce n’est donc pas étonnant qu’elle ait autant de succès chez nos ados.

 

Ecoutez l'intégralité de l'entretien avec le Dr Xavier Pommereau : 

Cette série délivre-t-elle des messages dangereux ?
Dr Xavier Pommereau : Les scénaristes, même s’ils ont probablement été conseillés par des psy, restent sur une vision simplifiée du processus suicidaire. Selon la série, il y aurait des causes, par exemple le harcèlement, qui entraîneraient forcément des pensées suicidaires. Heureusement que cela ne se passe pas comme ça. Il n'existe pas d'enchaînement purement logique dans lequel telle cause engendre tel effet.

Par ailleurs, la série ne décrit pas bien les vrais signaux d’alarme du mal être chez une adolescente. Une ado qui ne va pas bien ne passe pas à l’acte du jour au lendemain parce que son copain l’a trahi ou que sa coupe de cheveux ne lui va plus. Dans la série, les causes se mélangent. Le personnage principal tient à la fois pour responsable les prédateurs qui lui ont fait du mal mais aussi des gens qui sont simplement restés témoins ou qui n’ont rien vu.

Quels sont les signaux d'alerte du mal être d’un adolescent ?
Dr Xavier Pommereau : Ce sont les manifestations de rupture et les excès qui semblent sans explication. C’est par exemple la séparation brutale avec une camarade. En fait, c’est tout ce qui fait coupure, déchirure, cassure d’une manière irrationnelle et inexpliquée car cela témoigne d’une plus grande fragilité.

Et du fait que les auteurs ne l’ont pas suffisamment décrit, je suis incapable de dire si le personnage principal fait partie des 15 % d’ados qui vont mal, comme ceux que je vois dans ma pratique, ou si c’est une ado standard que les scénaristes ont chargé de traumatismes.

Je crois qu’il faut absolument que nous (parents et médecins, ndlr) puissions la regarder et en parler avec eux pour mesurer leur analyse et leur sens critique et avoir comment ils perçoivent le mal être de cette jeune fille qui s’est suicidée.