Stress post-traumatique
Comment une agression sexuelle peut impacter le cerveau
L'amygdale et le cortex préfrontal, impliqués dans le traitement et le contrôle des émotions, perdent leur capacité à se synchroniser chez les femmes souffrant d’un stress post-traumatique après une agression sexuelle.

- Par Geneviève Andrianaly
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Après s’être fait agressées sexuellement, 70 % des femmes victimes développent un trouble de stress post-traumatique, qui se traduit par une souffrance morale et des complications physiques altérant profondément la vie personnelle, sociale et professionnelle. De précédentes recherches ont révélé des modifications de la communication cérébrale chez les personnes traumatisées après des catastrophes naturelles, des accidents ou des guerres. Dans une étude, des scientifiques espagnols ont voulu déterminer si des changements cérébraux similaires survenaient après une agression sexuelle. "Le trouble de stress post-traumatique consécutif à une agression sexuelle a tendance à être particulièrement grave et s'accompagne souvent de taux plus élevés de dépression, d'anxiété et de pensées suicidaires", a déclaré Lydia Fortea, chercheuse à l'Hôpital Clinique de Barcelone qui a dirigé les recherches.
Une réduction marquée de la communication entre l’amygdale et le cortex préfrontal après une agression sexuelle
Pour les besoins des travaux, l’équipe a recruté 40 femmes souffrant de trouble de stress post-traumatique après une agression sexuelle récente (au cours de l'année écoulée). Un groupe de personnes dites "témoins" a également été recruté. Toutes les participantes ont effectué une IRM fonctionnelle au repos afin d'étudier la connectivité cérébrale et son lien avec les symptômes dépressifs et de trouble de stress post-traumatique. "Nous avons étudié la synchronisation des régions cérébrales clés impliquées dans le traitement des émotions, comme la peur, et leur régulation, à savoir l’amygdale et le cortex préfrontal, avec le reste du cerveau chez les patients. Nous nous sommes concentrés sur le système fronto-limbique, qui joue un rôle crucial dans la régulation des émotions et la réponse aux menaces", a précisé Lydia Fortea.
Les résultats, présentés lors du congrès de l’European College of Neuropsychopharmacology (ECNP) à Amsterdam, ont mis en avant une dysconnectivité fronto-limbique profonde chez les volontaires. Dans le détail, la communication entre l'amygdale et le cortex préfrontal était pratiquement perdue, chutant à zéro ou presque, chez 22 des 40 femmes souffrant de stress post-traumatique après une récente agression sexuelle. Lorsque la connexion entre l’amydgale et le cortex préfrontal s'affaiblit, le cerveau peut avoir du mal à gérer les réactions de peur ou à réguler ses émotions, "ce qui pourrait expliquer pourquoi les personnes souffrant de stress post-traumatique ressentent souvent une peur intense et présentent des sautes d'humeur."
Stress post-traumatique : "cette différence cérébrale n'est pas nécessairement un signe de la gravité des symptômes"
Néanmoins, les auteurs n’ont observé aucun lien direct entre cette altération cérébrale et la gravité de leur stress post-traumatique et de leurs symptômes dépressifs. "Cela suggère que, si cette différence cérébrale pourrait être une caractéristique du trouble lui-même, elle n'est pas nécessairement un signe de la gravité des symptômes, celle-ci dépend probablement d'autres facteurs." Désormais, les chercheurs veulent déterminer si ces perturbations de connectivité à la suite d’un une agression sexuelle pourraient contribuer à prédire la réponse au traitement du stress post-traumatique. "Si tel est le cas, nous pourrions identifier précocement les patientes présentant un risque plus élevé de complications et intensifier les efforts cliniques pour les aider à se rétablir", ont-ils conclu.