Onco-Digestif

Cancer colorectal métastique BRAF V600E : quid de la combinaison chimiothérapie encorafenib cetuximab ?

Les cancers colorectaux métastatiques (CCRm) BRAF V600E muté sont de mauvais pronostic, chimiorésistant et le traitement de référence de 1ère ligne est une bi- ou tri-chimiothérapie plus anti-angiogénique. L’essai BREAKWATER présenté à l’ASCO GI 2025 et publié simultanément dans le Nature Medicine évaluait la combinaison chimiothérapie plus encorafénib et cétuximab dans les CCRm BRAF V600E muté (1).

  • valiantsin suprunovich/iStock
  • 07 Février 2025
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    Les cancers colorectaux métastatiques (CCRm) BRAF V600E mutés représentent 10% des CCRm. Plusieurs essais ont montré l’efficacité de la combinaison encorafénib et cétuximab (EC), notamment l’essai de phase III BEACON en 2ème ligne et plus (2). En 1ère ligne de traitement des CCRm BRAF V600E mutés le standard est actuellement une bi ou tri-chimiothérapie plus anti-angiogénique (bévacizumab).

    L’essai de phase III BREAKWATER comparait la combinaison chimiothérapie (FOLFOX) plus EC versus EC versus traitement standard (SOC, chimiothérapie seule ou plus bévacizumab) en 1ère ligne de traitement des CCRm BRAF V600E mutés. Les résultats présentés à l’ASCO GI 2025 et publiés dans Nature Medicine sont ceux de la première analyse intermédiaire du taux de réponse en relecture centralisée (ORR BICR). Le critère de jugement principal était composite avec l’ORR BICR et la survie sans progression (SSP) du bras EC+FOLFOX versus SOC. Le bras EC a été stoppé après amendement.

    Les patients devaient avoir un statut OMS 0 ou 1, être naïfs de traitement et avoir une maladie métastatique considérée comme non résécable.

    Ici sont présentés la première analyse intermédiaire sur les 110 premiers patients traités dans chaque bras.

    Efficacité et tolérance de l’EC+FOLFOX vs SOC

    Au total, 479 patients ont été inclus et randomisés (EC+FOLFOX : n = 236 ; SOC : n = 243). Les caractéristiques étaient homogènes entre les 2 groupes, avec un âge médian de 61 ans, 51 % d’hommes et 54 % de statut OMS 0. Le taux de réponse objective passait de 61 % dans le bras EC+FOLFOX versus 40 % dans le SOC (odds ratio = 2,44, IC 95 % 1,40-4,25, p = 0,0008). Les taux de réponse étaient en faveur du bras EC+FOLFOX dans tous les sous-groupes.

    Les données de SSP n’étaient pas matures. Les données de survie globale n’étaient pas encore matures mais en faveur du bras EC+FOLFOX dans l’analyse intermédiaire (non atteinte versus 14,6 mois, hazard ratio = 0,47, IC 95 % 0,32-0,69, p = 0,00004).

    La tolérance de la combinaison EC+FOLFOX était acceptable mais associée à plus d’effets secondaires que la chimiothérapie seule (effets secondaires sévères EC+FOLFOX : 70 % versus SOC : 54 %) notamment en termes de d’anémie (11 % vs 3 %), de neuropathie (7 % vs 3 %) et de neutropénie (15 % vs 9 %).

    Perspectives

    Cette étude de phase III montre un gain significatif du bras EC+FOLFOX versus chimiothérapie standard en termes de taux de réponse objective dans les CCRm BRAF V600E mutés. Ce gain est observé dans l’ensemble des sous-groupes dont les tumeurs coliques droites et les patients avec métastases hépatiques. Néanmoins, il est impossible de conclure définitivement sur la positivité de l’étude car le co-critère principal de jugement incluait la réponse objective et la SSP non rapportée. Les données de SG sont encourageantes mais non matures. La tolérance de la combinaison EC+FOLFOX est acceptable avec néanmoins une majoration de la toxicité hématologique et de la neuropathie.

    Une critique peut être que le bras contrôle comporte une bi-chimiothérapie et non une tri-chimiothérapie plus bévacizumab qui est la chimiothérapie de référence des tumeurs « agressives ». Les résultats de réponse sont intéressants mais il faut néanmoins attendre les résultats définitifs de réponse et de survie pour pouvoir conclure définitivement à l’intérêt de la combinaison EC plus FOLFOX pour un remboursement et son utilisation en pratique courante en France. Cette combinaison serait notamment très intéressante en cas de nécessité de réponse (maladie agressive ou résécabilité secondaire envisagée) et/ou patient ne pouvant pas recevoir un triplet et/ou du bévacizumab.

     

    Références

    1. Kopetz, S., Yoshino, T., Van Cutsem, E. et al. Encorafenib, cetuximab and chemotherapy in BRAF-mutant colorectal cancer: a randomized phase 3 trial. Nat Med (2025).
    2. Kopetz S, Grothey A, Yaeger R, et al. Encorafenib, Binimetinib, and Cetuximab in BRAF V600E-Mutated Colorectal Cancer. N Engl J Med. 2019 Oct 24;381(17):1632-1643.

     

     

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