Gynéco-obstétrique

Perte de grossesse : l’aspirine à faible dose efficace chez les femmes en cas d’inflammation

De nouvelles recherches suggèrent qu'une dose quotidienne faible d'aspirine, débutée avant la conception et poursuivie jusqu’à 36 semaines d’aménorrhée, peut augmenter les chances de naissances vivantes à terme chez les femmes qui ont une inflammation chronique et une perte de grossesse.

  • alexraths/epictura
  • 13 Février 2017
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    Une sous-analyse de l’étude EAGeR a analysé les effets de l'aspirine à faible dose sur le taux de grossesse, les pertes de grossesse et les naissances vivantes à terme en fonction du niveau d’inflammation, avant et pendant la grossesse.

    Les résultats, publiés dans le Journal of Clinical Endocrinology & Metabolism, suggèrent qu'une faible dose quotidienne d'aspirine (81 mg/jour) pourrait aider les femmes qui ont déjà eu une perte de grossesse (fausse-couche spontanée ou décès fœtal in utero) à réussir à mener une grossesse vivante à terme.

    Les femmes qui prennent de l'aspirine à dose faible pendant la phase de conception et la grossesse auraient 35% de chances en plus de concevoir et de mener une grossesse vivante à terme.

    Une vaste étude initiale sur les pertes de grossesse

    L’étude EAGeR (effets de l'aspirine dans la gestation et la reproduction) avait été menée par l'Institut National US de la Santé (NIH). Le but initial de l’essai était de tester si une petite dose quotidienne d'aspirine pourrait prévenir la perte de grossesse ultérieure chez les femmes qui avaient déjà eu une ou deux fausses couches spontanées ou un décès fœtal in utéro.

    Il s’agissait d’un essai randomisé, en double aveugle, versus placebo, et mené dans quatre hôpitaux universitaires aux États-Unis. L’étude avait inclus 1 228 femmes en bonne santé, âgées de 18 à 40 ans, et qui essayaient activement de concevoir après la perte d’un bébé au cours d’une ou deux grossesses précédentes.

    Les participantes ont reçu une dose quotidienne de 81 milligrammes d'aspirine sur une durée allant jusqu'à six cycles mensuels pendant la phase de conception, puis durant toute la période de gestation jusqu’à 36 semaines d’aménorrhée chez les femmes qui ont réussi à concevoir.

    Une analyse en fonction de l’inflammation

    Pour cette nouvelle étude, les femmes ont été réparties par l'Institut National US de la Santé et du Développement de l'Enfant (NICHD), une division du NIH, en trois sous-groupes en fonction du taux de CRP qu’elles avaient dans le sang à l’inclusion.

    L'étude a examiné un sous-groupe de femmes qui avaient un faible taux de CRP (défini comme inférieur à 0,70 milligrammes par litre de sang), un sous-groupe où la CRP était moyenne (taux de CRP compris entre 0,70 et 1,95 mg/l) et un sous-groupe « CRP élevée » où les femmes avaient 1,95 mg/l ou plus de CRP dans le sang. Dans le cadre de l'essai randomisé, certaines de ces femmes ont reçu de l'aspirine et certaines d'entre elles ont reçu un placebo.

    Un phénomène qui serait inflammation-dépendant

    Dans cette nouvelle analyse, il n’a pas trouvé de différence significative entre le bras aspirine et le bras placebo pour les groupes à CRP faible et moyenne. Cependant, dans le groupe à CRP élevée, les femmes qui ont reçu le placebo ont le taux de natalité le plus faible (44%), tandis que les femmes qui ont pris une dose quotidienne faible d'aspirine ont un taux de naissances vivantes de 59%.

    Les femmes ayant un taux élevé de CRP bénéficieraient donc le plus du traitement par l'aspirine à faible dose : dans ce cas, le traitement entraîne une augmentation significative de 35% des naissances vivantes par rapport au groupe placebo (RR 1.35, IC 95% 1.08 à 1.67).

    En outre, les chercheurs ont mesuré les niveaux de CRP à 8, 20 et 36 semaines de grossesse pour les femmes qui ont réussi à mener une grossesse vivante à terme : dans ce cas, la prise d’aspirine semble associée à une réduction significative des niveaux de CRP au cours de la grossesse.

    En pratique

    Un traitement par aspirine à faible dose est souvent prescrit chez les femmes qui ont eu une fausse couche ou un décès fœtal in utero et qui souhaitent mener une grossesse vivante à terme.

    Une dose quotidienne faible d'aspirine ne semble pas prévenir la perte de grossesse dans une large population de femmes nord-américaines avec des antécédents d'une ou deux fausses-couches spontanées ou de décès fœtaux in utero antérieurs.

    Cependant, dans un groupe plus restreint de ces femmes qui avaient connu une seule perte récente de grossesse et qui avaient une CRP élevée avant la conception, l'aspirine augmenterait la probabilité de devenir enceinte et d'avoir une naissance vivante à terme.

    Certaines femmes peuvent avoir une inflammation chronique de bas grade, qui a été précédemment associé à une infertilité, et la prise d’aspirine à faible dose est couramment réalisée en Europe au cours des inflammations liées à des maladies systémiques. Cette étude semble démontrer le bien fondé de cette démarche.

    Dans la mesure où il s’agit d’une analyse rétrospective sur des sous-groupes de l’étude non-prévus au départ, d’autres recherches sont nécessaires pour reproduire et confirmer ces résultats. En outre, nous devons disposer de plus de données afin de comprendre comment l'inflammation est liée à la fécondité et comment l’aspirine influerait sur résultats de la grossesse dans cette population à CRP élevée.

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