Sexualité
Dépression : quels traitements pour préserver la santé sexuelle ?
Un test, capable de mesurer l’activité cérébrale, permet d’estimer la capacité d’un individu sous antidépresseur à atteindre l’orgasme. Il devrait permettre de proposer des traitements adaptés pour réduire le risque de dysfonction sexuelle.

- Par Mégane Fleury
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- romaset/ISTOCK
Comment préserver la fonction sexuelle lors d’un traitement antidépresseur ? Un test cérébral permet d’estimer le risque de troubles de la sexualité pendant un traitement contre la dépression. Il a été mis au point par des chercheurs de l’hôpital universitaire de Copenhague et présenté lors du Congrès du Collège européen de neuropsychopharmacologie. Des analyses de l’activité du cerveau permettent d’évaluer la capacité d’une personne sous antidépresseur à atteindre l’orgasme.
Dépression : les antidépresseurs peuvent provoquer des dysfonctions sexuelles
Les auteurs de cette étude rappellent que la dysfonction sexuelle est un symptôme fréquent de la dépression. "Les antidépresseurs inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) peuvent soulager la dysfonction sexuelle en améliorant l'humeur, mais les ISRS eux-mêmes sont souvent associés à des effets secondaires sexuels", soulignent les chercheurs danois. Cela peut être des difficultés à atteindre l'orgasme, une baisse de désir ou des difficultés à maintenir une érection. "Ces effets secondaires peuvent toucher jusqu'à 70 % des patients prenant des ISRS, tels que le Prozac et l’escitalopram", indiquent-ils.
Mesurer la sérotonine dans le cerveau pour comprendre les effets des antidépresseurs sur la sexualité
Pour comprendre les effets de ces antidépresseurs sur la fonction sexuelle, les scientifiques ont recruté 90 personnes souffrant de dépression. Ils ont mesuré leur activité dite sérotoninergique dans le cerveau pour évaluer les niveaux de sérotonine. Pour ce faire, les chercheurs ont utilisé un test appelé PEAD (Prévalence de l'intensité sonore des potentiels évoqués auditifs). "Ce test, comparable à un test auditif, révèle la façon dont le cerveau traite les sons, expliquent-ils. Étonnamment, il renseigne également sur le taux de sérotonine dans le cerveau : plus le PEAD est bas, plus l'activité sérotoninergique est élevée." Ensuite, tous les patients ont pris un traitement antidépresseur ISRS pendant huit semaines et les chercheurs leur ont demandé de signaler tout effet secondaire sexuel.
Troubles sexuels liés à la dépression : vers une prise en charge davantage personnalisée ?
"Nous avons découvert que les personnes présentant une activité sérotoninergique élevée avant le début du traitement étaient beaucoup plus susceptibles de développer des effets secondaires sexuels à la fin des 8 semaines de traitement antidépresseur, notamment des difficultés à atteindre l’orgasme, précise le Dr Kristian Jensen, chercheur principal. Grâce à cette mesure cérébrale non invasive, combinée à des informations sur les problèmes sexuels liés à la dépression, nous avons pu prédire la capacité à atteindre l'orgasme avec une précision de 87 %." Il rappelle qu’une étude de plus grande envergure est nécessaire pour valider ces conclusions, mais cela pourrait améliorer significativement la prise en charge de la dépression. De fait, les effets secondaires des médicaments sur la sexualité sont l’une des causes de l’arrêt du traitement par les patients.
"Si ces résultats sont confirmés, ils pourraient permettre une approche plus précise du traitement de la dépression, aidant les médecins à choisir les médicaments permettant de minimiser les effets secondaires sexuels chez les patients les plus susceptibles de développer des problèmes liés aux ISRS, poursuit le Dr Jensen. Cela pourrait améliorer l'observance du traitement et la qualité de vie globale, et offrir de meilleures options thérapeutiques pour la dépression." Une étude rassemblant 600 patients est en cours pour observer comment les taux de sérotonine affectent la fonction sexuelle en cas de dépression et de traitement.