Cardiologie

Hyperuricémie : pas d’impact de l’allopurinol sur le risque cardiovasculaire

L’étude ALL-HEART, présentée à l’ESC 2022 ne retrouve pas de bénéfice d’un traitement systématique par allopurinol, un hypo-uricémiant, des personnes âgées avec cardiopathie ischémique chronique, avec ou sans hyperuricémie, mais sans goutte.

  • Bacsica/istock
  • 30 Aoû 2022
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    L’impact des hyperuricémies symptomatiques sur le cours des maladies cardiovasculaires est controversé, et différentes études ont été publiées au fil des ans avec des résultats discordants. Des études observationnelles ont montré des résultats variables, tandis que de petits essais d'intervention ont suggéré des améliorations potentielles sur la pression artérielle, la fonction endothéliale, l'hypertrophie ventriculaire gauche ou l'épaisseur intima-média de la carotide, alors que d'autres non.

    L'étude ALL-HEART est un vaste essai visant à déterminer si l'allopurinol, donné à titre systématique, améliore le pronostic cardiovasculaire chez des patients avec cardiopathie ischémique chronique. Ses résultats, présentés lors congrès annuel de l'ESC 2022, montrent que l'allopurinol ne permet pas de réduire le critère d'évaluation primaire composite comprenant infarctus du myocarde non fatal, accident vasculaire cérébral non fatal ou décès d'origine cardiovasculaire chez les patients âgés atteints de cardiopathie ischémique.

    Pas de réduction de la morbi-mortalité cardiovasculaire

    La population de l'analyse en intention de traiter comprend 5 721 patients, dont 2 853 ont été randomisés dans le groupe allopurinol et 2 868 dans le groupe de traitements habituels. Il n'y a pas de différence entre les groupes en ce qui concerne le taux de survenue du critère d'évaluation principal.

    Celui-ci est survenu chez 314 (11,0%) participants dans le groupe allopurinol (2,47 événements pour 100 années-patients) et 325 (11,3%) dans le groupe traitement habituels (2,37 événements pour 100 années-patients), ce qui donne un rapport de risque (RR) de 1,04 (IC à 95% 0,89-1,21, p=0,65).

    Pas de différence sur la mortalité globale

    Il n'y a pas non plus de différence entre les groupes pour les critères secondaires concernant le délai de survenue des événements, à savoir l'infarctus du myocarde non fatal, l'accident vasculaire cérébral non fatal, le décès d'origine cardiovasculaire, la mortalité toutes causes confondues, l'hospitalisation pour syndrome coronarien aigu (SCA), la revascularisation coronaire, l'hospitalisation pour SCA ou revascularisation coronaire, l'hospitalisation pour insuffisance cardiaque et toutes les hospitalisations d'origine cardiovasculaire.

    Au total, 288 (10,1%) patients du groupe allopurinol sont décédés, contre 303 (10,6%) patients du groupe de soins habituels, soit un HR de 1,02 (IC à 95 % : 0,87-1,20, p=0,77). La tolérance a été globalement bonne et identique entre les 2 groupes.

    Cardiopathies ischémiques chroniques et âge élevé

    L'étude ALL-HEART a cherché à savoir si le traitement par allopurinol améliore le pronostic cardiovasculaire chez les patients atteints de cardiopathie ischémique chronique. L'étude a inclu des patients âgés de 60 ans ou plus souffrant de cardiopathie ischémique mais sans antécédents de goutte.

    Les patients ont été randomisés 1:1 pour recevoir de l'allopurinol titré jusqu’à la dose de 600 mg par jour en plus des traitements habituels versus les traitements habituels seuls. L'âge moyen est de 72 ans et 76% sont des hommes. Les participants ont été suivis par des questionnaires annuels. Le critère principal était une combinaison d'infarctus du myocarde non fatal, d'accident vasculaire cérébral non fatal ou de décès cardiovasculaire.

    Pas d’intérêt dans cette population

    Selon l'investigateur principal, le Professeur Isla Mackenzie, de l'Université de Dundee : « Les taux sériques moyens d'acide urique ont chuté de 0,34 mmol/L au début de l'étude à 0,18 mmol/L après 6 semaines de traitement, ce qui montre que le traitement a été efficace pour réduire l'acide urique ».

    Pourtant, « l'étude ALL-HEART montre que le traitement par allopurinol ne réduit pas les évènements cardiovasculaires majeurs chez les patients atteints de cardiopathie ischémique. La question de savoir si l'allopurinol peut prévenir les événements cardiovasculaires chez les personnes souffrant d'une maladie cardiaque mais pas de goutte clinique se pose depuis de nombreuses années et nous sommes heureux d'avoir maintenant répondu définitivement à cette question (…) dans une étude solide. »

    L'âge moyen est cependant de 72 ans et seulement près de 57% des patients du groupe allopurinol ont poursuivi leur traitement, mais, au final, les résultats suggèrent que l'allopurinol ne devrait pas être recommandé pour la prévention secondaire des événements cardiovasculaire chez des personnes de cet âge.

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    JDF