Pneumologie
Asthme de l’enfant : le paracétamol n'augmente pas le risque d'exacerbations
Une toute dernière étude, parue dans le NEJM, casse un tabou, celui de la contre-indication du paracétamol chez l'enfant asthmatique.
- @123rf Nagy-Bagoly Ilona
Depuis une quinzaine d’années, il est de bon ton de croire qu’asthme et paracétamol ne font pas bon ménage. En effet plusieurs études le plus souvent observationnelles ont établi un lien entre prise de paracétamol et risque d’apparition ou d’exacerbation d’un asthme. Cependant en raison de multiples facteurs de confusion possible comme les infections respiratoires saisonnières, qui en elles-mêmes constituent à la fois une bonne raison d’exacerbation de l’asthme et une des 1ères indications de prescription de paracétamol, il était intéressant d’avoir une approche plus rigoureuse.
Une autre étude en 2002 (1), cette fois-ci randomisée avait comparé la tolérance et les effets secondaires du paracétamol versus ibuprofène en utilisation courte dans des syndromes fébriles chez de jeunes enfants. Elle avait montré que le risque relatif de consultation pour asthme était plus important avec le paracétamol qu’avec l’ibuprofène. Bien évidemment, cet essai a fait grand bruit au point que certains médecins ont recommandé d’éviter la prise de paracétamol chez tout asthmatique tant que d’autres études ne montraient pas le contraire. Or une toute dernière étude parue dans le NEJM se montre très rassurante et rendraient caduques ces recommandations.
Etude randomisée en double aveugle
L’étude AVICA ( Acetaminophen versus Ibuprofen in Cildren with Asthma) menée au Boston Children Hospital est enfin l’étude que l’on attendait : randomisée, double aveugle, elle a comparé de façon prospective le paracétamol à l’ibuprofène chez des enfant asthmatiques. Elle montre qu’il n’y a aucune différence entre les 2 molécules par rapport au risque d’asthme.
300 enfants de 1 à 5 ans, présentant un asthme modéré ont été inclus et suivis pendant 48 semaines et ont reçu soit du paracétamol, soit de l’ibuprofène pour des symptômes de fièvre ou de douleurs. 5,5 doses de chaque type de médicaments ont été donnés en moyenne aux enfants, sur la période. Par ailleurs, les 2 groupes bénéficiaient du même traitement pour leur asthme (corticoïdes inhalés quotidiens et anti-leucotriènes.
75 % des enfants sont allés jusqu’au terme de l’étude.
Aucune différence entre paracétamol et ibuprofène
Les résultats ne montrent aucune différence entre les 2 groupes : le nombre d’exacerbations d’asthme par enfant est en moyenne de O,81 pour le groupe paracétamol et de 0,87 pour l’ibuprofène.
Au moins une exacerbation d’asthme est survenue chez 49% des enfants du groupe paracétamol versus 47% dans le groupe ibuprofène ; et au moins 2 épisodes sont survenus chez respectivement 21% et 24% des enfants.
Le pourcentage de jours où l’asthme était parfaitement contrôlé a été le même dans les 2 groupes ( 85,8% dans le groupe paracétamol vs 86,8% dans l’autre groupe). Le recours à des médicaments de crise (albuterol) a été quasiment identique. Enfin le nombre de consultations en urgence et non prévues a été également quasi équivalent (0,75 épisodes vs 0,76 pour l’ibuprofène).
Certes si l’étude paraît modeste en taille, elle est cependant assez puissante au plan statistique pour détecter des différences cliniques significatives, bien plus en tous les cas que les précédentes études qui n’étaient pas randomisées. De plus elles n’avaient pas éliminé le fait que les exacerbations pouvaient être liées aux infections respiratoires.
Reste à savoir si les résultats de cette étude s’appliquent aussi à des asthmes plus graves et moins bien contrôlés ou encore à d’autres tranches d’âge. Les auteurs précisent qu’il faudrait pour ces cas là envisager d’autres études.
(1) Lesko SM, Louik C, Vezina RM, Mitchell AA. Asthma morbidity after the short-term use of ibuprofen in children. Pediatrics 2002;109:E20-E20








