Gastro-entérologie
Maladie cœliaque : un sur-risque de mortalité persistant malgré le traitement
La maladie cœliaque est associée à un risque de mortalité accru d’environ 20% par comparaison à la population générale. Ses causes sont multiples et il semble persister après le diagnostic.
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Dans une étude de cohorte rétrospective portant sur 49 829 patients suédois atteints de la maladie cœliaque, le taux de mortalité serait 21% plus élevé que dans la population générale (9,7 contre 8,6 décès pour 1000 personnes-années), une différence statistiquement significative.
L'augmentation relative du risque de mortalité est retrouvée dans toutes les tranches d'âge et serait plus importante chez les personnes diagnostiquées dans la tranche d'âge de 18 à 39 ans. L’étude est parue dans la revue JAMA.
Une étude de cohorte nationale
Toutes les personnes en Suède atteintes d’une maladie cœliaque diagnostiquée entre 1969 et 2017 ont été identifiées grâce à la cohorte Epidemiology Strengthened by histoPathology Reports in Sweden (ESPRESSO). Les participants (n = 49 829) ont été suivis à partir du jour de la biopsie intestinale.
La maladie cœliaque a été définie par la présence d'une atrophie des villosités de l'intestin grêle sur des biopsies au cours des années 1969-2017. Chaque personne a été appariée à au moins 5 personnes-témoins dans la population générale suédoise en fonction de l’âge, du sexe, de la région et de la période calendaire.
Augmentation de 21% du risque de décès
Au total, 49 829 patients souffrant de la maladie cœliaque ont été analysés, dont 24% avaient été diagnostiqués récemment, entre les années 2010 et 2017. L'âge moyen (SD) au moment du diagnostic était de 32,2 (25,2) ans et 62,4% étaient des femmes.
Au cours d'une médiane de suivi de 12,5 ans, 13,2% des personnes (n = 6596) sont décédées. Par rapport aux témoins (n = 246 426), la mortalité globale a augmenté chez les personnes atteintes de maladie cœliaque : 9,7 contre 8,6 décès pour 1000 personnes-années, soit une différence absolue de 1,2 pour 1000 personnes-années et un HR de 1,21 (IC à 95%, 1,17-1,25).
Des causes de décès diverses
L'augmentation relative du risque de mortalité est observée dans tous les groupes d'âge mais est la plus importante dans la tranche d'âge diagnostiquée tardivement, entre 18 et 39 ans (1,9 contre 1,1 pour 1000 personnes-années ; HR, 1,69 [95% CI, 1,47-1,94] ; p <0,001).
Le risque accru de décès chez les personnes atteintes de la maladie cœliaque serait en lien surtout avec une maladie cardiovasculaire (3,5 contre 3,4 pour 1 000 personnes-années ; HR, 1,08 [95 % CI, 1,02-1,13]), un cancer (2,7 contre 2,2 pour 1 000 personnes-années ; HR, 1,29 [95 % CI, 1,22-1,36]) et une maladie respiratoire (0,6 contre 0,5 pour 1 000 personnes-années ; HR, 1,21 [95 % CI, 1,08-1,37]).
Risque initial plus élevé
Par rapport aux témoins, le risque global de mortalité est le plus élevé au cours de la première année suivant le diagnostic (15,3 contre 6,5 pour 1000 personnes-années ; HR, 2,34 [IC 95%, 2,14-2,55]), mais il persiste au-delà de 10 ans après le diagnostic (10,5 contre 10,1 pour 1000 personnes-années ; HR, 1,15 [IC 95%, 1,10-1,20]), malgré le régime sans gluten en vigueur.
Le risque de mortalité est également présent pour les patients diagnostiqués au cours des années les plus récentes, 2010-2017 (7,5 contre 5,5 pour 1000 personnes-années ; HR, 1,35 [IC 95%, 1,21-1,51]).
Une maladie auto-immune
La maladie cœliaque est une entéropathie d'origine immunitaire caractérisée par une malabsorption, une atrophie des villosités de l’intestin grêle et des anticorps anti-transglutaminase. Elle est déclenchée par l'ingestion de gluten, une protéine présente dans le blé, le seigle et l'orge.
Une surmorbidité et une surmortalité ont été documentées pour la maladie cœliaque non diagnostiquée. Une normalisation clinique, sérologique et histologique se produit généralement après l'instauration du régime sans gluten, cependant, la plupart des études ont montré que même après le diagnostic, la maladie cœliaque reste associée à une mortalité accrue.
Ce risque accru a été attribué aux multiples comorbidités associées à la maladie cœliaque, notamment les maladies lymphoprolifératives, les fractures ostéoporotiques, le diabète de type 1, et d'autres affections. En réalité, le mécanisme par lequel la maladie cœliaque est associée à un sur-risque de mortalité est inconnu, bien qu'il soit possible que l'inflammation chronique systémique, un facteur de mortalité dans d'autres maladies, puisse être la cause sous-jacente.
En pratique, dans une population suédoise étudiée sur les 50 dernières années, un diagnostic de maladie cœliaque est associé à une augmentation faible mais statistiquement significative du risque de mortalité par comparaison à la population générale.








