Rhumatologie
Polyarthrite rhumatoïde : pas besoin d’imagerie pour ajuster le traitement
Dans le cadre de la stratégie de traitement de la polyarthrite rhumatoïde, le monitoring du traitement en fonction d’objectifs définis par des scores clinico-biologiques traditionnels semble suffisant. L’apport de l’IRM semble modeste, voire, nul pour l’ajustement du traitement.
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La polyarthrite rhumatoïde est un rhumatisme inflammatoire destructeur pour les articulations et cela est lié à une inflammation et une hypertrophie de la membrane synoviale très agressives, différentes de celles retrouvées dans d’autres rhumatismes chroniques. Les 2 grands progrès de ces dernières années ont été le diagnostic précoce grâce à l’imagerie (qui détecte mieux les synovites que l’examen clinique), et le traitement aux objectifs en fonction du score DAS, avec une stratégie d’escalade des traitements accélérée, et ceci jusqu’à la mise en rémission.
Dans la mesure où certains malades en rémission clinique gardent une inflammation échographique ou IRM et qu’il existe une progression radiologique minime chez 20 à 30% d'entre eux, la question se posait d’ajuster le traitement jusqu’à disparition de l’inflammation résiduelle en imagerie. Une étude randomisée sur 200 malades et 2 ans de suivi montre que l’imagerie IRM n’apporte aucun bénéfice par rapport à l’ajustement thérapeutique en fonction sur DAS-CRP, le score clinico-biologique choisi pour évaluer l’inflammation de la maladie. Cette étude est parue dans le JAMA.
Pas de bénéfice clinique ou radiologique
Parmi les 171 participants qui ont terminé l'essai, il n'y a pas de différence significative entre les patients du groupe conventionnel et ceux du groupe IRM. En particulier, il n'y a aucune différence de score d'activité de la maladie (DAS28-CRP <2,6 ; [85,3%] vs [88,3%]) et il n'y a pas non plus de preuve de progression des lésions radiographiques en moyenne ([66,2%] vs [62,4%]).
La plupart des critères secondaires et exploratoires sont peu différents et surtout peu exploitables. Par contre, le recours aux biothérapies est beaucoup plus élevé dans le groupe monitorage IRM (46%) que dans le groupe score clinico-biologique (2%).
Sur-traitement avec le monitorage IRM
Les arrêts de traitement sont plus fréquents dans le groupe monitorage IRM que dans le groupe conventionnel (24% contre 5%) et les effets indésirables sont également plus importants dans le groupe IRM (19 vs 7). Ces résultats sont cohérents avec des études identiques sur l’évaluation en imagerie mais réalisées avec des échographies articulaires.
Au final, l'utilisation de l'imagerie pour guider le traitement de la PR ne répond pas aux critères d'utilisation rationnelle des médicaments tels que définis par l'Organisation mondiale de la santé, car l'utilisation de l'imagerie pour guider le traitement a conduit à la prescription plus fréquente de médicaments potentiellement plus dangereux et plus coûteux sans différence ni bénéfice avéré quant aux résultats.
Pas de rôle pronostique de l’ostéite
Dans cet essai, aucune modification de la progression des atteintes articulaires mesurée en IRM ne s'est produite au cours du suivi à deux ans, y compris en dépit d’une ostéite persistante (œdème inflammatoire osseux) dans le groupe des malades monitorés de façon conventionnelle. Ce résultat est similaire à celui observé chez les patients randomisés dans le groupe IRM et traités jusqu'à la résolution de l'ostéite.
L'observation que la progression des érosions osseuses évaluées par IRM n'était pas significativement différente entre les 2 groupes malgré des scores d'ostéite significativement plus faibles dans le groupe IRM suggère que l'ostéite résiduelle chez les patients en rémission clinique n'est pas systématiquement associée à la progression des lésions articulaires.
Mais comme environ un tiers des malades ont une progression radiologique minime, on peut se demander s’il ne faut pas choisir des objectifs de rémission plus stringents que ceux qui ont été retenus (DAS-CRP < 1.9 plutôt que 2.6) et s’il ne faut pas privilégier les associations de traitements de fond de synthèse (car un tiers des malades reste en monothérapie à la fin du traitement).
Importance de la rémission clinique
Les patients en rémission clinique prolongée ne présentent donc que peu ou pas de progression des lésions articulaires en radiologie ou en IRM, tout au moins sur les mains et les poignets (car les pieds n’ont pas été analysés) et cette étude confirme les observations antérieures selon lesquelles une inflammation infraclinique ne signifie pas obligatoirement une progression des lésions articulaires.
De plus, l’essai a démontré qu’il était possible de maintenir cette rémission avec une monothérapie par traitements de fond de synthèse chez la plupart des malades souffrant de RA. Les résultats de l’étude démontrent également l’importance du suivi en fonction de l’évaluation utilisant des mesures composites clinico-biologiques de l’activité de la maladie. Ces résultats auraient sans doute été encore meilleurs en choisissant un niveau de score encore plus bas (rémission plutôt que faible activité clinique).
Traitement en fonction d’une rémission sur le DAS
Les objectifs thérapeutiques les plus importants dans le traitement de la polyarthrite rhumatoïde (PR) sont la suppression des signes et symptômes (tels que douleurs articulaires, gonflement et rigidité), ainsi que la suppression ou la limitation de la progression des lésions articulaires et ainsi maximiser les chances de préserver les capacités fonctionnelles et la qualité de vie. Ces objectifs peuvent être atteints en obtenant la rémission de la maladie, un état dans lequel il ne reste aucune inflammation ou une juste une inflammation résiduelle minime. Cet objectif est désormais réalisable chez 50% des malades, en utilisant des médicaments approuvés dans le cadre d'une stratégie de traitement aux objectifs.








