Onco-Digestif
Cancer colorectal métastatique : pas de nouveau traitement en 1ère ligne
L’essai de phase III SOLSTICE avait pour objectif de comparer l’efficacité et la tolérance de la combinaison trifluridine–tipiracil plus bévacizumab Vs capécitabine plus bévacizumab en traitement de 1ère ligne de patients atteint de cancers colorectaux métastatiques. Cet essai ne montre pas de bénéfice pour cette combinaison en terme de survie sans progression ou en terme de tolérance.
- volkan arslan/iStock
Les cancers colorectaux métastatiques (CCRm) résistants à la chimiothérapie systémique sont traités par régorafénib ou trifluridine–tipiracil (TAS102), sans supériorité démontrée de l’une de ces molécules par rapport à l’autre. Le trifluridine–tipiracil est une chimiothérapie cytotoxique proche des fluoropyrimidines avec néanmoins un mécanisme d’action différent ainsi qu’une tolérance apparemment meilleure que celle de la capécitabine en monothérapie.
Plusieurs essais ont démontré l’intérêt d’une chimiothérapie par fluoropyrimidine seule ou combiné au bévacizumab en 1ère ligne de traitement de CCRm chez les patients âgés, ayant des comorbidités, non éligibles à une chimiothérapie « agressive » et/ou une maladie pauci-symptomatique. C’est notamment le cas de l’essai AVEX qui a démontré la supériorité de la capécitabine plus bévacizumab à la capécitabine seule. Depuis, le traitement des cancers colorectaux métastatiques chez les patients âgés non éligibles à une chimiothérapie « intensive » repose donc sur la combinaison capécitabine plus bévacizumab.
De son côté, l’essai de phase II TASCO-1 avait montré une efficacité et une tolérance acceptable de la combinaison trifluridine–tipiracil plus bévacizumab. L’objectif de l’essai SOLSTICE était donc d’évaluer l’efficacité et la tolérance de la combinaison trifluridine–tipiracil plus bévacizumab versus capécitabine plus bévacizumab, en traitement de 1ère ligne des CCRm non éligibles à une chimiothérapie intensive.
Les critères de l’essai SOLSTICE




L’essai SOLSTICE est un essai randomisé de phase III, en ouvert, multicentrique, comparant trifluridine–tipiracil plus bévacizumab versus capécitabine plus bévacizumab en traitement de 1ère ligne des CCRm. Les patients devaient être non éligibles à une chimiothérapie « intensive » par doublet ou triplet ainsi qu’à une chirurgie curative, selon l’investigateur. Le critère principal de jugement était la survie sans progression (SSP).
Au total, 856 personnes ont été incluses dans cette étude, avec un suivi médian de 16,6 mois. Au sein de cette cohorte, la population était en majorité de sexe masculin (54 % d’homme), âgée de plus de 70 ans (61 %), en bon état général (81 % OMS 0 ou 1) et avec un score G8 supérieur ou égal à 14 chez 50 % des patients. Les taux de réponse étaient de 36 % dans le groupe trifluridine–tipiracil plus bévacizumab et 42 % dans le groupe capécitabine plus bévacizumab.
Pas d’amélioration de la survie sans progression
Sur le critère principal de jugement qu’était la survie sans progression, l’essai est négatif puisque la SSP du groupe trifluridine–tipiracil plus bévacizumab est de 9,4 mois contre 9,3 mois pour le groupe capécitabine plus bévacizumab (HR=0,87 ; 95%CI 0,75–1,02; p=0,0464) (Figure 1). Cependant, en analyse multivariée exploratoire, il y a une tendance à un gain en SSP plus important avec le trifluridine–tipiracil plus bévacizumab en cas de score de co-morbidité de Charlson bas (0 versus 1–2).

ORR : taux de réponse objective. IC95% : intervalle de confiance à 95%. PFS : survie sans progression. EI : effet indésirable.
Pas d’amélioration de la tolérance
Les effets secondaires de grade 3 ou plus, reliés au traitement étaient ceux attendus, cependant, ils étaient nettement plus importants dans le groupe trifluridine–tipiracil plus bévacizumab par rapport au groupe capécitabine plus bévacizumab. Les plus fréquents incluaient la neutropénie (52 % dans le groupe trifluridine–tipiracil plus bévacizumab versus 1% dans le groupe capécitabine plus bévacizumab), l’anémie (14% vs 4%) et le syndrome main pied (0% vs 15%).
Pas de place en 1ère ligne de traitement des CCRm
Par rapport à la combinaison capécitabine plus bévacizumab, l’essai SOLSTICE ne montre pas de supériorité pour la combinaison trifluridine–tipiracil plus bévacizumab en traitement de 1ère ligne des patients avec un CCRm non éligibles à une chimiothérapie intensive. Et ce, que ce soit en terme de survie sans progression ou en terme de tolérance. La combinaison capécitabine plus bévacizumab reste donc le standard en 1ère ligne de traitement des patients non éligibles à une chimiothérapie intensive, le plus souvent en raison de l’âge et/ou des comorbidités.
En revanche, la combinaison trifluridine–tipiracil plus bévacizumab versus trifluridine–tipiracil a été évalué dans l’essai SUNLIGHT chez les patients avec un CCRm multi-traité. Cet essai est positif et devrait changer nos pratiques. Actuellement il n’y a pas de place pour remplacer la capécitabine par du trifluridine–tipiracil dans nos schémas de chimiothérapie sauf peut être en cas de déficit complet en DPD.











