Onco-dermatologie

Mélanome et immunothérapies : une mauvaise tolérance est-elle bon signe ?

Les immunothérapies sont de plus en plus prescrites notamment dans le mélanome. Les effets secondaires inhérents à ces traitements pourraient-ils être synonymes d’une meilleure efficacité ?

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  • 25 Mai 2020
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    Les immunothérapies comportant des inhibiteurs de check-point immunitaires (anti-CTLA4, anti-PD-L1..) ont révolutionné le panorama thérapeutique de l’oncologie. Autrefois cantonnés aux situations métastatiques, ils sont aujourd’hui utilisés en situation adjuvante, notamment pour les patients mélanome de stade III. Cet article s'intéressera à l'association entre la survenue d'une toxicité et une meilleure réponse thérapeutique 

    Une sous-analyse des résultats de l’essai EORTC 1325 / Keynote-054 c’est concentrée sur l’association entre survenue d’évènements indésirables immuns (irAE) et la survie sans progression. Ces évènements indésirables immuns (irAE) peuvent être classés en 3 groupes : endocriniens (hypo/hyper thyroïdie, thyroïdite, diabète de type 1, insuffisance surrénalienne), cutanés (vitiligo) ou tout type confondu (endocriniens, pneumonie ou atteinte interstitielle pulmonaire, sarcoïdoses, vitiligo et réaction cutanée sévère, colite, pancréatite, hépatite, néphrite, uvéite, myosite et myocardite). Comparativement au placebo, la réduction du risque de récidive ou de décès sous pembrolizumab est plus importante après la survenue d’un irAE qu’en l’absence d’irAE ou avant son déclenchement (HR : 0,37 ; IC : 0,24-0,57 vs HR : 0,61 ; IC : 0,49- 0,77, p = 0,03). De même la survenue d’un irAE était associée, dans le bras actif, à une SSP plus longue (HR : 0,61 ; IC : 0,39- 0,95 ; p = 0,03).

    Un bénéfice encore plus « net » en cas de vitiligo

    Rappelons que l’essai Keynote-054 avait démontré l’efficacité du pembrolizumab versus placebo, avec une survie sans progression prolongée (HR : 0,57 ; IC : 0,43- 0,74). 1011 patients ont été inclus dans l’étude ; 622 (61,5 %) étaient des hommes ; 386 (38,2 %) étaient âgés de 50 à 64 ans ; 248 (24,5 %) avaient plus de 65 ans et 377 (37,4 %) moins de 50 ans. Le suivi médian a été de 15 (13-17) mois. L’incidence des irAE de grade 1 ou supérieur s’élevait à 3 mois à 19,4 % (IC95% : 16,1- 23,0) et à 37,4 % (IC95% : 33,2- 41,6) à 15 mois. En comparaison, les incidences ont été respectivement de 4,0 % (2,5-6,0) et de 9,0 % (CI : 6 ,7- 11,7) sous placebo. Dans la grande majorité des cas, les irAE sont survenus dans les 6 premiers mois de l’immunothérapie. Les plus fréquents ont été l’apparition d’un vitiligo ou d’une dysthyroïdie. Ils ont été notés, sous pembrolizumab, avec une égale fréquence dans les 2 sexes (36,6 % chez les hommes et 38,6 % chez les femmes). Ils ne variaient pas non plus selon l’âge des patients ou le stade du mélanome.

    Des effets indésirables cutanés à prendre en compte

    Près d’1/3 des patients sous immunothérapies seront touchés par des effets indésirables  cutanés ayant un impact important sur la qualité de vie. Ces toxicités surviennent en général dans les 6 premiers mois de traitement, sont de faibles grades et ne nécessitent pas l’arrêt de l’immunothérapie dans la grande majorité des cas. Ces réactions peuvent être variées allant d’un « simple » rash maculo-papuleux au DRESS, en passant par le vitiligo, des dermatoses bulleuses auto-immunes ou une éruption psoriasiforme. Il faut, dans tous les cas prévenir le patient que de tels symptômes peuvent arriver et mettre en place une prise en charge adaptée par un dermatologue. Il ne sera pas toujours nécessaire de stopper l’immunothérapie, le traitement à potentiellement mettre en place sera déterminé en fonction du type de manifestation et de son intensité.

    Perspectives et conclusions

    Des résultats similaires ont déjà été rapportés précédemment dans le mélanome mais également dans le cancer du poumon à un stade avancé.

    Les effets indésirables immuns semblent donc être associés à une meilleure réponse thérapeutique, notamment pour le vitiligo chez les patients traités pour mélanome.

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