Oncologie

Métastases : prépondérance du microenvironnement tumoral et de l'immunité

Les caractéristiques génomiques des cellules cancéreuses semblent peu pertinentes pour prédire le potentiel métastatique d’une tumeur, à la différence de la vascularisation lymphatique péri-tumorale et l'intensité de la réponse immunitaire.

  • J Galon/inserm
  • 24 Février 2016
  • A A

    Une analyse génomique des tumeurs chez des malades atteints d'un cancer colorectal montre une très forte hétérogénéité des tumeurs. Chaque malade a donc « son » cancer, génétiquement bien individualisé, mais aucun lien n'a pu être mis en évidence entre le type de mutations retrouvé dans la tumeur, l'expression de ces gènes mutés ou l'instabilité chromosomique des cellules de la tumeur primitive par rapport au développement de métastases.
    En revanche, d’autres différences significatives existent entre tumeurs qui vont métastaser et les autres : la densité des vaisseaux lymphatiques du microenvironnement tumoral est significativement plus faible pour les tumeurs ayant donné naissance à des métastases par rapport à celui des tumeurs qui restent localisées. De même, qu’il existe un plus faible Immunoscore®, une moindre densité et une moindre fonctionnalité des cellules immunitaires dans ces tumeurs métastatiques.

    Une analyse extensive

    Ces données sont issues des recherches de l'unité 1138 « Immunologie et cancérologie intégratives » (Inserm, universités Pierre-et-Marie-Curie et Paris-Descartes).
    Les chercheurs de cette unité ont analysé les tumeurs de 838 patients atteints d'un cancer colorectal, localisé (662) ou métastasé (176), afin d'identifier les meilleurs marqueurs prédictifs du potentiel métastatique d'une tumeur.
    Ils ont réalisé l'examen le plus exhaustif possible, en analysant l’ensemble des altérations génétiques par séquençage génétique complet et en utilisant différentes approches pour caractériser au mieux la réponse immunitaire de l'hôte

    Meilleure compréhension du processus métastatique

    En général, c'est la capacité des cellules tumorales à migrer dans l'organisme pour coloniser des organes distants qui détermine l'issue d’un cancer. La plupart des décès des malades atteint d'un cancer sont donc dus non pas à la tumeur initiale, mais à ses métastases.
    Malgré son importance clinique, ce phénomène reste mal connu. Or, toute tumeur est entourée de fibroblastes (cellules de soutien du tissu conjonctif), de vaisseaux sanguins et lymphatiques, et elle est infiltrée par de nombreuses cellules du système immunitaire de l'hôte. Tout cela compose son « microenvironnement tumoral ».

    Des différences stables

    Afin de déterminer l’exacte nature des liens qui existent entre microenvironnement tumoral et risque de métastases, l'équipe s'est intéressée à des cancéreux montrant, soit des signes précurseurs de dissémination, soit une tumeur localisée, mais avec le développement ultérieur d’une métastase.
    Les chercheurs ont retrouvé les mêmes caractéristiques que dans les tumeurs déjà métastasées : une moindre densité de vaisseaux lymphatiques et une réponse immunitaire adaptative plus faible.

    Des implications thérapeutiques

    La moindre densité de vaisseaux lymphatiques et la réponse immunitaire adaptative plus faible sont ainsi deux paramètres indépendants qui pourraient donc constituer des marqueurs précoces du potentiel métastatique d'une tumeur. Leur analyse combinée pourrait ainsi renforcer la pertinence de la prédiction du phénomène et ainsi élaborer des traitements préventifs des métastases plus efficaces.

    « Les immunothérapies tendant à renforcer la réponse des lymphocytes T améliorent la survie des malades ayant déjà des métastases. Nos résultats montrent qu'elles pourraient aussi bénéficier à des patients atteints de tumeurs localisés, mais ayant une réponse immunitaire faible, donc susceptibles de développer des métastases » estime Jérôme Galon, directeur de recherche à l’Inserm U 1138.

    Mlecnik B et al. The tumor microenvironment and Immunoscore are critical determinants of dissemination to distant metastasis. Science Transl Med 2016

    Pour pouvoir accéder à cette page, vous devez vous connecter.