Onco-Sein
Cancers du sein HER2+ avec maladie résiduelle : le trastuzumab emtansine améliore la survie globale
Chez les patientes atteintes d’un cancer du sein précoce HER2+ qui conservent une maladie résiduelle après chirurgie malgré un traitement néoadjuvant, l’utilisation de T-DM1 (trastuzumab emtansine), un anticorps conjugué à un médicament, en adjuvant s’avère nettement supérieure au trastuzumab pour prévenir les rechutes et prolonger la survie. À 7 ans, la survie globale atteint 89,1 % sous T-DM1, contre 84,4 % sous trastuzumab.
- Ridofranz/istock
Environ 45 à 66 % des patientes atteintes d’un cancer du sein HER2+ ont encore une maladie invasive résiduelle du sein ou des ganglions de l’aisselle après une chimiothérapie néoadjuvante à base de taxanes et d’anti-HER2. La persistance de cette maladie résiduelle est associée à un risque accru de récidive et de mortalité. KATHERINE, essai de phase 3 en ouvert, a comparé l’efficacité d’un traitement adjuvant par T-DM1 (trastuzumab conjugué à un agent cytotoxique) versus trastuzumab seul après la chirurgie chez ces patientes à haut risque ayant eu un traitement néoadjuvant par trastuzumab et taxane. Lors de l’analyse initiale (médiane de suivi : 3,4 ans), le T-DM1 avait réduit de moitié le risque de récidive invasive ou de décès (HR = 0,50 ; p < 0,001).
Les résultats actualisés (médiane de suivi : 8,4 ans) confirment la supériorité persistante de T-DM1 pour la survie sans maladie invasive (HR = 0,54) et révèlent désormais un bénéfice significatif en survie globale (HR = 0,66 ; p = 0,003). À 7 ans, la différence absolue de survie globale atteint 4,7 points (89,1 % vs 84,4 %). L’incidence d’événements indésirables de grade ≥ 3 est de 26,1 % dans le groupe T-DM1 versus 15,7 % dans le groupe trastuzumab.
Amélioration de la survie dans tous les sous-groupes
Cette amélioration substantielle de la survie s’observe dans presque tous les sous-groupes : statut ganglionnaire résiduel, statut hormonal, typologie de la tumeur (HER2 IHC 3+ ou 2+ avec amplification ISH), âge et contexte clinique initial. Notamment, les patientes dont la tumeur avait une expression HER2 plus élevée (IHC 3+) ont semblé tirer un avantage plus marqué (HR = 0,47). L’efficacité de T-DM1 demeure aussi observable chez les patientes avec de faibles résidus tumoraux (T1b ou T1a), malgré un nombre limité d’événements.
Concernant les métastases cérébrales, la survenue initiale de localisations cérébrales est légèrement plus fréquente sous T-DM1 que sous trastuzumab (52 vs 38 cas). Toutefois, une fois la première récidive passée, les nouveaux cas de métastases cérébrales étaient nettement moins nombreux sous T-DM1 (4 vs 19). Au total, l’incidence cumulée finale de métastases cérébrales reste donc similaire. Côté tolérance, les toxicités immuno-allergiques et hépatiques restent globalement conformes à ce qu’implique l’emploi d’un anticorps conjugué à un médicament. Les effets secondaires de grade 3–4 sont plus élevés qu’avec le trastuzumab seul (26,1 % vs 15,7 %), mais la majorité sont gérables sans toxicités tardives majeures.
Une analyse finale après 8,4 ans de médiane de suivi
Il s’agit d’un essai multicentrique en phase 3, avec répartition aléatoire de patientes ayant un cancer du sein HER2+ non métastatique, traité au préalable par chimiothérapie néoadjuvante + trastuzumab, mais avec une maladie résiduelle à la chirurgie. Elles ont ensuite reçu soit un anticorps conjugué à un médicament T-DM1, soit du trastuzumab seul, pour 14 cycles adjuvants. Cette analyse finale (médiane de suivi de 8,4 ans) est évènement-dépendante et constitue la seconde analyse intermédiaire de la survie globale. La conception en ouvert impose des biais potentiels, mais le critère principal (maladie invasive ou décès) a été évalué par un comité indépendant et s’avère solide.
Selon les auteurs, ces résultats confirment T-DM1 comme standard pour les patientes HER2+ avec résidu tumoral mammaire ou axillaire post-chirurgie malgré un traitement néoadjuvant, améliorant à long terme la survie sans maladie et la survie globale. Toutefois, certaines sous-populations, notamment celles ayant un statut HER2 IHC 2+, demeurent à risque significatif de rechute, suggérant un besoin de stratégies additionnelles. Plusieurs essais en cours évaluent l’association de T-DM1 à d’autres agents (tucatinib, trastuzumab deruxtecan, inhibiteurs de checkpoint immunitaire…) pour réduire encore le risque de rechute.
En conclusion, le suivi prolongé de l’essai KATHERINE renforce la supériorité d’un anticorps conjugué à un médicament T-DM1 par rapport au trastuzumab seul pour les patientes HER2+ avec résidu tumoral post-chirurgical après traitement néoadjuvant, démontrant non seulement une baisse durable du risque de récidive, mais aussi un gain en survie globale.











