Neurologie

Alzheimer : un anticorps contre les plaques amyloïdes a son AMM aux USA

La FDA, l'agence de santé américaine, vient d’autoriser la mise sur le marché d’un anticorps monoclonal qui cible les plaques amyloïdes dans le cerveau des malades souffrant d'Alzheimer. La réduction de la charge amyloïde est nette mais des essais cliniques post-autorisation doivent être menés pour vérifier la réalité des bénéfices sur les fonctions cognitives.

  • KatarzynaBialasiewicz/iStock
  • 08 Jun 2021
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    C’est une première depuis presque 20 ans. Un nouveau médicament contre la maladie d'Alzheimer a été autorisé le lundi 7 juin aux États-Unis par la FDA - la Food and Drug Administration.

    Cette autorisation de mise sur le marché est logique étant donnée la réduction de la charge amyloïde mais est cependant assortie de conditions. La FDA a demandé au laboratoire Biogen de poursuivre les essais cliniques post-autorisation afin de vérifier les bénéfices sur les fonctions cognitives de cibler les plaques amyloïdes dans le cerveau. Certains experts pensent en effet qu'il est plus intéressant de cibler la protéine Tau.

    Un médicament contre les plaques amyloïdes

    Baptisé Aduhelm, et produit par l’entreprise pharmaceutique Biogen, ce traitement est le premier à s’attaquer directement à des lésions cérébrales observées au cours de la maladie : les plaques amyloïdes. Cet anticorps monioclonal, l'aducanumab, réduit significativement “la présence de plaques amyloïdes dans le cerveau”, a précisé la FDA dans un communiqué.

    En novembre dernier, un comité d’experts a émis un avis défavorable quant à une possible mise sur le marché de ce médicament. Le panel a jugé que le traitement n’a pas suffisamment fait ses preuves sur le bénéfice clinique de cette réduction. Il s’est basé deux études aux résultats contradictoires. La première a conclu sur l’efficacité du médicament qui aurait permis, selon Biogen, de diminuer les plaques amyloïdes de façon significative, de rogner de 23% le déclin cognitif par rapport à un placebo, et de ralentir jusqu’à 40% la perte d’autonomie. La deuxième étude a elle fourni des résultats négatifs. Si les conclusions de ce comité ne sont qu’un avis et n’obligent pas la FDA, il est rare de voir cette dernière ne pas les suivre.

    Une autorisation conditionnelle

    Cette fois, l’Agence américaine des médicaments a décidé de ne pas suivre l’avis du comité d’experts et d’autoriser la vente du médicament. “La FDA a déterminé qu’il existe des preuves substantielles que l’Aduhelm réduit les plaques amyloïdes dans le cerveau et que la réduction de ces plaques soit raisonnablement susceptible d’entraîner d’importants bénéfices pour les patients”, a-t-elle justifié dans son communiqué. Ainsi, l’Agence a “conclu que les bénéfices (…) surpassent les risques”.

    Néanmoins, cette dernière préfère jouer la sécurité en ne conférant qu’une autorisation conditionnelle, une possibilité qui n’avait pas été étudiée par le comité. “La FDA demande à Biogen de conduire des essais cliniques post-autorisation pour vérifier les bénéfiques cliniques du médicament, a ainsi précisé le régulateur américain. Si le médicament ne fonctionne pas comme prévu, nous pourrons prendre des mesures pour le retirer du marché.” A noté que ce type de retrait secondaire d'une autorisation de mise sur le marché avait déjà été observé dans le passé avec l'Avastin quand les études post-autorisation dans le cancer du sein n'avaient pas révélé le bénéfice initial.

    Réserve de nombreux experts

    L’arrivée du nouveau médicament a été reçue avec certains réserves. Pour l’American Alzheimer Association, ce nouveau traitement est une très bonne nouvelle. “Nous nous réjouissons de cette décision historique”, a-t-elle réagi dans un tweet.

    Le comité consultatif de la FDA a déclaré que les résultats soulevaient des doutes quant à l'efficacité réelle de l'anticorps sur les fonctions cognitives. Ils ont également déclaré que même s'il pouvait ralentir le déclin cognitif chez certains patients, le bénéfice suggéré par les résultats des études serait si faible qu'il ne compenserait pas le risque d'œdème ou de saignement dans le cerveau qui a pu être observé avec cet anticorps dans les essais.

    Pour le professeur en neurosciences au University College de Londres, John Hardy, cité par l’AFP, l’enthousiasme est plus modéré. “Si je suis heureux que l’aducanumab ait reçu une autorisation, nous devons être clairs sur le fait qu’au mieux ce médicament aura un bénéfice marginal qui aidera uniquement certains patients choisis avec soin. Nous aurons besoin de meilleurs médicaments à l’avenir.” La plupart des experts considère en effet qu'un anticorps anti-protéine Tau a plus de chance d'être efficace sur le déclin cognitif, sachant que ces anticorps sont encore en cours d'étude.

    Les essais cliniques dans la maladie d'Alzheimer sont compliqués à mener car il est souvent difficile de recruter suffisamment de participants à un stade précoce avec un modeste déclin cognitif. La maladie pouvant évoluer très progressivement, les essais doivent être de grande envergure et se poursuivre pendant de nombreux mois afin de pouvoir vérifier si un médicament ralentit réellement le déclin cognitif.

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    JDF