Etat des lieux

Leucémie : le point sur la maladie  

Après avoir rencontré un survivant de la leucémie lors d’un événement organisé le 25 novembre par la Fondation Capucine pour lever des fonds, Pourquoi Docteur fait le point sur ce cancer qui touche environ 9 000 personnes chaque année en France. 

  • Par Raphaëlle de Tappie
  • Ridofranz/iStock
  • 25 Nov 2019
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    Les leucémies regroupent plusieurs types de cancers du sang, et touchent environ 9 000 personnes chaque année en France. Si le taux de survie est plutôt positif (plus de 80% des enfants atteints de leucémie aiguë lymphoblastique guérissent définitivement, et moins de 20 % rechutent), chez l’adulte en revanche, les résultats sont plus sombres. Les traitements sont plus lourds, ont des effets secondaires et les rechutes fréquentes. Après avoir rencontré un survivant de la leucémie lors d’un événement organisé le 25 novembre par la Fondation Capucine pour lever des fonds pour lutter contre cette maladie, Pourquoi Docteur fait le point sur la situation.  

    La leucémie, qu’est-ce que c’est ?

    La leucémie est une forme de cancer du sang se manifestant par la prolifération de cellules jeunes dans la moelle osseuse et le sang. Il s’agit le plus souvent de cellules immatures qui au lieu de mûrir et d’assurer le transport de l’oxygène, la coagulation et la défense de notre organisme contre les microbes, restent bloquées et envahissent la moelle osseuse, l’empêchant de créer des cellules sanguines normales et fonctionnelles. 

    On distingue plusieurs formes de leucémies. Selon le degré de maturité des cellules anormales, et les anomalies moléculaires, la maladie est dite myéloïde ou lymphoïde.

    Enfin, la leucémie, myéloïde ou lymphoïde, peut être aiguë ou chronique. La première évolue très vite : les cellules leucémiques envahissent toute la moelle osseuse, le sang, puis la plupart des organes. En l’absence de traitement, elle est rapidement mortelle. Dans le cas d’une leucémie chronique, les cellules malignes sont en général bien différenciées et les symptômes se manifestent tardivement, moins bruyamment. 

    Qui est touché ?

    Pour les formes chroniques, en 2013, Santé publique France estimait à environ 5 200 le nombre de personnes touchées, avec une plus forte prédominance du type lymphoïde chronique (4 460 cas estimés). Dans le détail, elle atteint principalement les séniors et surtout les hommes : elle représente 40% des leucémies des sujets de plus de 65 ans. Etant donné l’âge des malades, le plus souvent ces derniers ne décèdent pas de leur maladie hématologique. La leucémie myéloïde chronique (LMC) est quant à elle bien plus rare puisqu’elle concerne 15 à 20 % des leucémies de l'adulte. 

    Quant aux leucémies aigües, plus de 3 250 nouveaux cas auraient été diagnostiqués en France en 2012, soit 1% de l’ensemble des cancers. La leucémie aigüe myéloide (LAM) est la plus fréquente chez l’adulte. Sa fréquence augmente avec l’âge. La leucémie aiguë lymphoblastique (LAL), est quant à elle la leucémie aigüe la plus fréquente chez l'enfant. Elle survient surtout entre 2 et 15 ans et est rare chez l’adulte.

    Hormis de très rares cas d’origine chimique et radiologique, les causes de ce cancer sont encore mal connues.

    Comment sait-on qu’on est malade ?  

    Au début de la maladie, le patient souffrira de fièvre, d’infections à répétition (pneumonies, bronchites, angines persistantes malgré les antibiotiques…), de fatigue liée à une anémie ou encore de perte de poids. La coagulation du sang étant douloureuse, des ecchymoses ou des saignements anormaux peuvent également apparaître. Enfin, les malades peuvent souffrir de ganglions, d’une atteinte cutanée et même cérébrale.

    Quand surgissent les premiers symptômes, le patient se rend le plus souvent chez son médecin qui lui prescrit alors une prise de sang. Le diagnostic s’effectue en fonction d’une formule sanguine, la NFS, qui montre une baisse ou une augmentation du nombre des globules blancs, une baisse de globules rouges et des plaquettes, en fonction du type de leucémie. Un examen de la moelle osseuse (myélogramme) permet ensuite de confirmer le diagnostic et le type de leucémie en analysant les cellules de la moelle osseuse. Ces dernières sont prélevées sous anesthésie locale au niveau du sternum ou de l'os iliaque. Une analyse génétique et moléculaire des cellules leucémiques permet de mieux préciser le type de leucémie et son pronostic. 

    “J’avais 24 ans quand ça m’est tombé dessus. J’étais étudiant en médecine et j’ai assez vite compris de quoi il s’agissait ainsi que l’urgence de mon médecin de m’envoyer à l’hôpital. Le soir de mon hospitalisation, je suis passé voir mes parents, je leur ai dit que j’allais bien et que je passais les voir sans raison. Ce soir là, je voulais les voir mais je n’ai pas osé leur dire la vérité car j’avais trop peur de mourir. Ce fut la pire nuit de ma vie et je pensais que jamais je ne reverrai le jour. Le diagnostic a été assez rapide et on m’a expliqué qu’heureusement la médecine avait fait des progrès mais mon seul espoir était d’avoir une greffe”, témoigne Ian, 31 ans et survivant de la leucémie lors d’un concert organisé au New Morning (Paris 10e) par la Fondation Capucine pour lever des fonds. 

    Quels traitements ?

    Une fois le diagnostic établi, le patient est rapidement admis à l’hôpital dans un service spécialisé dans les maladies du sang, dans un secteur stérile afin d’éviter toutes les infections en attendant que les globules blancs normaux réapparaissent après le traitement.

    Une chimiothérapie est ensuite administrée par voie intraveineuse avec pour objectif de détruire les cellules jeunes et malades qui se multiplient dans la moelle osseuse et le sang. Il faut ensuite attendre entre quatre à six semaines que les cellules saines se produisent à nouveau. Au cours de cette période, le patient est fragilisé car il a très peu de cellules sanguines normales. Il nécessite des transfusions sanguines et est surveillé plusieurs fois par jour au cas où une infection apparaîtrait. 

    “Après mon diagnostic, on a commencé les traitements, chimiothérapie, radiothérapie, j’ai perdu 20 kilos de muscle. Ma journée après ça c’était simplement de passer du lit à la chaise, je ne pouvais pas rester debout trop longtemps car j’étais fatigué. Si je devais prendre une douche il fallait que je réfléchisse avant pour m’organiser”, raconte Ian.

    La chimiothérapie peut ensuite s’associer à une greffe de moelle osseuse, un tissu spongieux semi-liquide présent dans l’ensemble du squelette dont une partie produit les différentes cellules du sang. Le donneur peut faire partie de la famille : en théorie, un malade a une chance sur quatre d’être compatible avec son frère ou sa sœur, car il existe quatre possibilités différentes de distribution des antigènes HLA.

    Lorsqu’il n’y a pas de donneur compatible dans la fratrie, il faut trouver donneur non-apparenté compatible. Le médecin contracte alors le registre France greffe de moelle pour y trouver, au niveau national ou international, un donneur dont les caractéristiques génétiques se rapproche au maximum de celles du malade.

    “J’ai trois frères et sœurs mais aucun n’était compatible pour me donner de la moelle osseuse donc on est reparti en chimio et en radiothérapie et un jour heureusement j’ai trouvé mon donneur, anonyme. Il n’est pas Français mais Allemand, car heureusement, on bénéficie d’une entraide européenne, explique Ian, pour qui fort heureusement l’histoire se finit bien. Grâce à lui j’ai été greffé, j’ai pu reprendre mes études et ma copine de l'époque est aujourd'hui ma femme.”

    Où en est la recherche ?

    Si beaucoup de progrès restent à faire, de nouvelles stratégies thérapeutiques sont mises au point régulièrement et améliorent les résultats. Elles consistent à utiliser des anticorps thérapeutiques pour cibler spécifiquement les cellules leucémiques afin de les rapprocher de nos cellules du système immunitaire et de les détruire. Qui plus est, des petites molécules ont pu être développées afin de spécifiquement inhiber des protéines des responsables de la leucémie. On parlera alors de thérapie ciblée.

    Récemment, des chercheurs du centre d’études sur le cancer M. D. Anderson de l’université du Texas ont découvert qu’associer l’immunothérapie et la chimiothérapie pourrait donner de bons résultats pour les personnes atteintes d’une leucémie aiguë myéloïde. Les cellules CD3 étaient particulièrement réactives à la combinaison de médicaments. “Cela pourrait être un biomarqueur sur lequel s’appuyer pour choisir les patients qui peuvent bénéficier de cette combinaison de traitement”, expliquait Naval Daver, le directeur de la recherche, dans son papier.

    Pour que la recherche continue d’avancer, il faut des fonds, toujours plus de fonds. “Il faut que pensiez de manière positive et peu importe ce que vous donnez votre geste comptera dans la balance”, conclut un chercheur financé par la Fondation Capucine.

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    JDF