Controverse

Zika : des chercheurs brésiliens trouvent un nouveau moustique vecteur

Des chercheurs brésiliens affirment que les moustiques Culex, une espèce très répandue, seraient vecteurs de Zika. Des résultats qui ne font pas l'unanimité parmi les spécialistes.

  • Par Anne-Laure Lebrun
  • IAEA Imagebank/Flickr
  • 25 Jul 2016
  • A A

    Des nouveaux travaux sur le virus Zika ont jeté le trouble au Brésil. Lors d’une conférence de presse tenue ce jeudi, des chercheurs de la Fondation Oswaldo Cruz ont annoncé que les moustiques Culex récoltés dans la région de Recife, l’épicentre de l’épidémie, peut transmettre le virus. Des résultats qui ne font pas consensus dans la communauté scientifique.

    Jusqu’à maintenant, les experts estiment que seules 2 espèces de moustiques sont responsables de la transmission du virus Zika chez l’homme : Aedes aegypti et Aedes albopcitus, le fameux moustique tigre. Le premier est plutôt un moustique de la ville, alors que le second apprécie les zones urbaines presqu’autant que les régions forestières. Points communs : tous deux piquent le jour et se reproduisent dans les petits contenant d’eau claire.

    Le moustique Culex est tout l’opposé. Cet insecte nocturne - celui qui prévient de sa présence en sifflant à nos oreilles – vit dans les eaux sales. Sa population serait 20 fois plus importante que celle d’Aedes aegypti au Brésil. « Toute la lutte anti-vectorielle a ciblé les moustiques Aedes qui sont les vecteurs reconnus du Zika, souligne à Pourquoidocteur Anna-Bella Failloux, entomologiste et responsable de l’unité Arbovirus et Insectes Vecteurs à l’Institut Pasteur. Or, les molécules utilisées et les doses nécessaires pour lutter contre leur prolifération et celle du Culex ne sont pas les mêmes. Donc on se demande si on n’est pas passé à côté de quelque chose. »

    De fait, encore aujourd’hui, les experts ont du mal à expliquer la fulgurance de l’épidémie, notamment en raison de la faible compétence vectorielle des moustiques Aedes. Face aux nombreuses interrogations, les chercheurs de la Fondation Oswaldo Cruz à Recife se sont donc penchés sur les moustiques Culex.
    Dans des maisons où des cas suspects de Zika ont été signalés, les scientifiques ont collecté près de 5 000 moustiques. Plus de 85 % d’entre eux feraient partie de l’espèce Culex. L’analyse de la salive de 456 femelles a révélé la présence du Zika dans un petit groupe. Il semblerait même qu’il soit capable de transmettre le virus.


    Des résultats contradictoires

    Néanmoins, Anna-Bella Failloux reste sur ses gardes. « A l’Institut Pasteur, nous avons réalisé la même expérience avec des moustiques Culex du Sud de la France et des tropiques, et nous n’avons pas observé le virus dans la salive du moustique même 21 jours après l’infection », explique la chercheuse. Ces résultats devraient être publiés prochainement.

    Ecoutez...
    Anna-Bella Failloux, responsable de l’unité Arbovirus et Insectes Vecteurs à l’Institut Pasteur: « La compétence vectorielle est la capacité d'un moustique à transmettre un virus donné...»

    Leurs collaborateurs brésiliens, Ricardo Lourenço-de-Oliveira et son équipe, de la Fondation Oswaldo Cruz située à Rio de Janeiro ont eux aussi récoltés des moustiques, dont des Culex quinquefasciatus, Aedes aegypti et Aedes albopictus sur le terrain pour déterminer s’il pouvait être vecteur du virus. Résultat : seuls les moustiques Aedes agypti étaient porteurs du Zika. Une conclusion à nouveau corroborée par des travaux américains parue cette semaine.

    La spécialiste souligne par ailleurs que les travaux de l’équipe de Recife n’ont pas encore fait l’objet d’une publication scientifique. Leurs données n’ont donc pas été évaluées par leurs paires. « J’aimerai bien lire cet article pour voir exactement comment ils ont fait et essayer de comprendre pourquoi 3 équipes de recherche montrent que le moustique Culex ne transmet pas le virus Zika alors qu’eux le trouve », insiste sceptique Anna-Bella Failloux.

    Pour laisser un commentaire, Connectez-vous par ici.
    

    JDF