Attention prévention

20% des femmes africaines utilisent des crèmes dépigmentantes : pourquoi sont-elles dangereuses pour la santé ?

Selon les chiffres communiqués par la Mairie de Paris, 20% des femmes africaines utilisent des crèmes dépigmentantes pour s'éclaircir la peau. En quoi sont-elles dangereuses ?

  • Par Anaïs Col
  • kazzakova/Epictura
  • 19 Fév 2018
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    Selon la Mairie de Paris, 20% des femmes africaines utilisent des crèmes dépigmentantes. Les marques diffèrent selon les pays d’origine, mais leur objectif est le même pour toutes : s’éclaircir la peau. Une pratique dangereuse, interdite dans en France, notamment à cause de l’hydroquinone, un composé organique aromatique qui contribue au vieillissement prématuré de la peau, la fragilise et l’expose à certains types de cancer. En empêchant la production de mélanine d’agir, la peau perd également sa protection naturelle contre les rayons UVA et UVB du soleil.

    L’hydroquinone dans l’industrie

    L’hydroquinone est utilisé dans plusieurs secteurs industriels comme le processus de fabrication des revêtements et du caoutchouc, la photographie en noir et blanc, les polymères, la peinture, les vernis, huiles à moteur, produits agrochimiques, ou encore dans le traitement de l’eau comme agent antirouille pour évaporateurs.

    Les dangers d’une application cutanée à long terme

    Appliqué pure sur la peau, il peut causer une rougeur extrême, une sensation de brûlure, ou provoquer des démangeaisons. L’application cutanée à long terme de produits éclaircissants à base d’hydroquinone peut ainsi épaissir les fibres de collagène de la peau et endommager les tissus conjonctifs. Ce qui conduit à une peau rugueuse, parfois couverte de tâches foncées. L’hydroquinone peut également amincir la peau et laisser apparaître des vergetures définitives.

    Selon le dermatologue Pierre-Patrice Cabotin, "le problème de l'hydroquinone, c'est que ça entraîne un éclaircissement en inhibant les cellules pigmentaires (les mélanocytes), mais ça a également un effet destructeur. À la longue, on peut avoir des dépôts en profondeur, du fait de la dégradation de l'hydroquinone et de divers produits de la mélanine qui donnent des peaux noirâtres – l'ochronose – et qui sont définitives". Il précise : "On peut utiliser de l'hydroquinone, sur des durées limitées, à des concentrations définies, et sous surveillance médicale".

    Un phénomène de société

    Mais l’éclaircissement de la peau est un phénomène de société. De Kinshasa à Conakry en passant par Abidjan ou Dakar, on fait croire aux femmes qu’elles seront plus belles métisses. Qu’elles plairont plus aux hommes, qu’elles porteront chance à leur foyer. En mai 2008, le Docteure Fatimata Ly, présidente de l’association internationale d’information sur la dépigmentation artificielle (AIIDA), a organisé une journée de sensibilisation pour évoquer "les aspects médicaux, sociaux, et religieux de la dépigmentation artificielle. Il s’agissait de sensibiliser la population sur les méfaits et dangers de la dépigmentation et de condamner le rôle des médias audio-visuels faisant la publicité des produits dépigmentants".

    Elle explique au site Afrik.com que "le phénomène a pris tellement d’ampleur qu’il est devenu le troisième problème de santé publique dans ce pays, après le paludisme et les maladies respiratoires". Mais il semble difficile d’enrayer le marché des crèmes éclaircissantes qui devrait peser plus de 31,2 milliards de dollars en 2024 à l’échelle mondiale.

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    JDF