Santé médico-légale

Certificat de décès : les assureurs menacent le secret médical

Pression sur le secret médical, indemnisations des médecins... Plusieurs problèmes relatifs aux certificats de décès ont été soulevés par le Conseil de l’ordre des médecins et le Défenseur des Droits.

  • Par Mathias Germain
  • DURAND FLORENCE/SIPA
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  • 10 Jan 2014
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    Attaque cérébrale, accident de la route… lorsqu’un décès survient il n’est pas toujours possible de contacter le médecin traitant. Les familles, les proches ou le centre de secours sont alors amenés à contacter un autre médecin pour remplir un certificat de décès. Or, d’après une mission du Conseil national de l’Ordre, les médecins sont de plus en plus « réticents à faire gratuitement un acte nécessitant temps, déplacement et surtout engageant leur responsabilité concernant une personne qu’ils n’ont jamais été amenés à suivre, » indique le CNOM. En l’absence de prise en charge de l’acte par l’assurance maladie, il existe un vide administratif.

    « Ce dysfonctionnement est source sur tout le territoire national de difficultés regrettables tant pour les familles, leurs proches, les professionnels de santé, les forces de sécurité et les collectivités locales, » souligne le CNOM qui se tourne vers l’Etat et rappelle que depuis 2009 les ministres de la santé ont été régulièrement interpellés par les élus à l’Assemblée nationale…

    Les certificats de décès sont aussi la source d’autres tensions entre les médecins et les compagnies d’assurance. Le journal Le Parisien révèlait cette semaine l’histoire d’une femme dont la mère était décédée et qui ne parvenait pas à récupérer le capital décès dont elle était bénéficiaire. Pour prouver que la cause du décès ne faisait pas partie des clauses d’exclusion du contrat, l’assureur avait réfusé le certificat médical fourni par la fille et exigeait que ce soit l’un des médecins de la mère qui remplisse un document type très détaillé, qui bafouait le secret médical. « On s’est aperçu dans cette histoire qu’on demandait la pathologie, depuis quand elle avait démarré, le type de traitement, les arrêts de travail… enfin plein d’éléments qui sont normalement accesibles à personne », témoigne Alain-Michel Ceretti, conseiller auprès du Défenseur des Droits.

    Cette histoire n’est pas un cas isolé. « Régulièrement,  les conseils départementaux sont amenés à rappeler par écrit aux compagnies d’assurance que les questionnaires qu’ils demandent de remplir vont au-delà de ce qui exigible pour faire valoir les droits des bénéficiaires », témoigne le Dr André Deseur, vice-président du CNOM. Autre faille dans la préservation du secret médical : les compagnies d’assurance demandent que les informations soient envoyées au médecin conseil, mais très généralement, le nom de ce médecin conseil n’est pas indiqué, et l’adresse donnée est celle d’un service administratif », explique le Dr André Deseur.

    Ecouter le Dr André Deseur, vice-président du Conseil national de l’ordre des médecins."Il faut que les informations soient adressées nommément à un médecin de l'assureur".


    Mais, en plus de cette pression sur le secret médical, le Défenseur des Droits s’est aperçu d’un vide juridique pour les personnes qui ne sont pas mariées, ou parents avec la personne décédée. « En effet, la loi du 4 mars 2002, relative aux Droits des malades, a restreint la communication des pièces d’un dossier médical aux enfants, aux parents ou aux personnes mariées, explique Alain Michel Ceretti. « Les personnes pacsées ou autres ne peuvent pas obtenir des informations médicales et ne peuvent donc pas faire valoir leurs droits auprès des assurances lorsqu’elles ont par exemple contracté un prêt immobilier en commun… ». Le Défenseur des Droits invite donc le gouvernement à mener rapidement une réflexion pour trouver des solutions concrètes à cette situation. 

    Ecouter Alain-Michel Ceretti, conseiller auprès du Défenseur des Droits. "Pour les établissements de santé, la communication des pièces d'un dossier médical relève de la loi du droit des malades, or cette loi a restreint l'accès aux ayants droits de sang".

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    JDF